Pour exécuter quelques travaux de peinture, je me rends dans le supermarché de bricolage le plus proche de chez moi.

Pinceaux, rouleaux, laque… Une chute de contre-plaqué pour confectionner une étagère… Tout est dans mon chariot. Jusque-là, tout va bien.

Le cauchemar de la caisse automatique

En arrivant à la caisse automatique, je ressens une étrange impression, un peu oppressante. D’habitude, à cette heure-là, il n’y a pas grand monde. Or beaucoup de gens attendent devant les caisses. Ils sont anormalement nombreux, anormalement silencieux, comme s’ils étaient vaguement inquiets.

Dans cette ambiance morose, j’attends mon tour.

Lorsqu’il arrive, je me retrouve devant une caisse automatique. Bon, pas de quoi fouetter un chat. J’ai déjà expérimenté cette situation dans d’autres supermarchés. Pas de souci ! Pas de quoi s’inquiéter et s’angoisser. Les gens sont décidément inquiets pour rien du tout…

Je passe mes articles sous le lecteur de code-barre, puis les pose sur la balance qui vérifie que le poids correspond au prix… Jusque-là, pas de problème…

Pourtant, la file, derrière moi, s’allonge… J’ai un moment d’inquiétude : suis-si lent ?

Je passe enfin ma chute de contre-plaqué. Je fais bien la différence entre « code donné en rayon » et « code donné en caisse ».

Sauf que là, rien ne se passe.

J’ai beau appuyer avec mon doigt sur la case « code donné en rayon », une fois, deux fois, trois fois… Je change de doigt : puisque mon index est inopérant, peut-être que mon majeur me sortira de cette mauvaise passe… mais rien ne se passe. La file derrière moi s’allonge encore. Il semble bien que je ne suis pas le seul à éprouver des difficultés à communiquer avec mon robot, car la même chose se produit à chaque caisse.

Heureusement, une jeune employée est là pour aider les clients. Je l’appelle. Elle se tourne vers moi, s’efforçant à arborer un sourire commercial : elle est manifestement épuisée, de grands cernes soulignent ses yeux. D’autres clients l’interpellent, certains avec aigreur.

Je m’en veux de l’avoir dérangée dans ses tentatives d’aider des clients déboussolés…

Peut-être que je vais m’en tirer tout seul…

J’appuie avec un autre doigt sur la case « code donné en rayon ».

Rien ne se passe…

– Désolé mademoiselle, mais je n’y arrive pas.

Interrogée de toute part, sollicitée par quatre clients en même temps, débordée, elle trouve un instant pour me dire gentiment qu’il faut appuyer sur la case « code donné en rayon ». Elle n’en peut plus, elle est épuisée… Et il n’est même pas dix heures du matin… J’essaie avec les doigts de la main gauche… Rien !

J’ai honte de la déranger à nouveau :

– Désolé mademoiselle, mais ça ne marche pas.

Écrasée par les demandes incessantes des clients, l’héroïque conseillère trouve un instant pour venir vers mon écran et me dire gentiment :

– Il faut toucher la case « code donné en rayon ».

Je m’apprête à lui répondre que je le fais vainement depuis plusieurs minutes, lorsqu’elle appuie sur la case en question…

Et là, par je ne sais quel miracle informatique, la machine accepte l’ordre tactile de l’héroïque conseillère.

Autrement dit, depuis quelques minutes, j’appuie en vain sur une case, et il ne se passe rien d’autre que l’allongement de la file d’attente devant la caisse…

Une jeune hôtesse de caisse, épuisée mais bienveillante, fait de même et la situation se dénoue par miracle.

Interloqué, je me tourne vers les gens de la file d’attente derrière moi. Je lis dans les regards une compréhension, une compassion, une fraternité qui me rassurent. J’entends même des phrases indulgentes, dues sans doute à la crainte que les clients éprouvent à se retrouver bientôt dans la même situation que moi, quand leur tour viendra de passer à la caisse…

Depuis, je suis sorti d’affaire. Ouf ! J’ai pu régler ma facture à l’aide de ma carte bancaire.

Pourquoi mon doigt ne fonctionne-t-il pas ?

Mais une question me hante : Pourquoi mon doigt ne fonctionne-t-il pas ? Suis-je décidément un ringard absolu aux doitgs inopérants.

J’ai fait de multiples vérifications pour me rassurer et vérifier mon doigt : il fonctionne sur l’écran tactile des automobiles, sur l’écran des GPS, sur des moniteurs, sur des tablettes…

Mais il me reste une inquiétude : sur une plaque de cuisson céramique, il n’actionne pas la touche « boost ».

Mais j’y parviens avec mon auriculaire.

Qui pourrait me donner l’explication de cette angoissante question ?

Lire : Nomophobie, jamais sans mon téléphone

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