C’est clair : l’avion pique du nez. Après des années d’euphorie au Luxembourg, le secteur de la construction connaît un trou d’air préoccupant. Va-t-on vers un crash de cette branche essentielle à l’économie nationale (au bas mot 104.000 emplois) ? Certains le craignent et lancent depuis quelques mois des SOS à l’intention du gouvernement.

Le message a été entendu et, fin avril, le conseil de gouvernement a décidé de la mise en place d’une Task Force sur le sujet. “Commando de choc” chargé de trouver les mesures qui permettraient de regagner de l’altitude que Lex Delles, ministre des Classes moyennes, a déjà réuni à deux reprises.

Une certitude : le péril approche à la vitesse d’un supersonique. Dans une réponse parlementaire, le ministre de l’Économie le reconnait : « La situation pourrait empirer après les congés collectifs d’été, lorsque les carnets de commandes se seront vidés sans que de nouvelles commandes ne soient entrées ». Et Franz Fayot de craindre que les petites entreprises de construction « soient plus exposées » car la liste des chantiers à assurer est plus restreinte que celle des grandes entités.

Rassurer d’abord, agir ensuite

Même inquiétude du côté de la Chambre immobilière. Récemment son président, Jean-Paul Scheuren, insistait pour que les agences puissent mettre en œuvre des plans de maintien dans l’emploi (comme dans l’industrie). Sans quoi « il n’y aurait plus d’alternatives au licenciement de personnels » dans ce secteur aussi.

Pour l’heure, le gouvernement n’a pas encore tendu ce parachute de secours. Façon de rassurer et de dire que tout n’est pas perdu.

La preuve, souligne Franz Fayot, le comité de conjoncture (qui décide de l’octroi du chômage partiel) est loin d’être submergé par les demandes issues du secteur de la construction ou de l’immobilier. Cela se limite à une demande par mois, note le ministre.

Du côté des faillites, même si le nombre de dossiers a augmenté, c’est essentiellement en raison de la défaillance de certains promoteurs (exploitant plusieurs sociétés), on pense à Cenaro par exemple. Reste que les chiffres sont vertigineux : selon le Statec, le nombre de faillites dans le secteur de la construction est le double pour les 3 premiers mois de 2023 en comparaison avec le premier trimestre 2022.

Il n’empêche, le ministre sait que si l’activité de la construction ne reprend pas un peu d’altitude, les dégâts seront importants. Touchant, selon lui en premier lieu « les promoteurs immobiliers, les architectes et les bureaux d’études qui seront impactés, puisqu’ils jouent un rôle essentiel dans la mise en place des projets ».

A la Chambre des métiers, c’est d’ailleurs cet “effet domino” que l’on craint. Une pièce tombe, les autres suivent. Mais la Task Force pourrait bien réussir à éviter ce scénario catastrophe. « Nous avons eu l’occasion de présenter des pistes d’action et avons senti le ministre Delles réceptif. Reste au gouvernement d’agir… vite », note Norry Dondelinger.

Comme le Programme de 2009

Certes le retour sur certaines décisions politiques (comme la réduction du taux de rendement maximal sur les loyers ou la réduction du taux d’amortissement) ne semblent pas faire partie du plan de vol envisagé par l’équipe de Xavier Bettel. « Mais pourquoi pas voir les investissements publics pour des constructions être avancés dans le calendrier ou augmentés ? »

Il ne s’agirait pas de lancer, d’un coup de baguette magique, de vastes projets mais de booster de plus petits chantiers de rénovation par exemple, ou de travaux de construction en marché négocié qui ne demandent pas de longues procédures. De quoi redonner un peu de visibilité aux 8.600 entreprises du secteur. « La crise était un peu différente alors, mais en 2009 le Programme de conjoncture lancé par le Premier ministre Juncker avait bien fonctionné. Il faudrait une réaction à cette échelle », croise-t-on les doigts à la Chambre des métiers.

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