Le portrait de Corinne avait suscité nombre de réactions lors de sa publication l’année passée. Lesfrontaliers propose de le rédecouvrir.

Corinne s’ennuie dans son job. Cette chargée de recrutement de 29 ans, travaille depuis plus de 3 ans dans la même société. Basée à Leudelange, cette dernière est spécialisée dans le recrutement de profils financiers, IT et en communication.

Originaire d’Apach, et titulaire d’un master en langues appliquées, elle ne se destinait pas à ce métier. C’est au cours d’un premier stage de 3 mois dans le cadre de ses études, auprès d’un département RH d’une société de conseil luxembourgeoise, qu’elle découvre ce domaine et y prend goût.

18 mois plus tard, alors qu’elle termine ses études, elle choisit d’effectuer son second stage comme assistante RH, dans le recrutement à nouveau, cette fois pour une société spécialisée dans la gestion de patrimoine.

En 2014, à la fin de cette expérience professionnelle, elle postule à une annonce de junior recruteur, et est immédiatement embauchée par la SSII dans laquelle elle travaille toujours aujourd’hui.

Missions routinières

J’ai la chance et la malchance d’être dans une petite structure : c’est un poste un peu hybride dans lequel je fais beaucoup de recrutement, un peu de RH, un peu de comptabilité. Je peux donc toucher à plein de choses, mais je n’ai aucune possibilité d’évolution de carrière”, regrette-t-elle.

La journée typique de Corinne consiste en la recherche de profils, la réception, la lecture et la sélection de CV, pour le compte des clients : “On effectue aussi beaucoup d’entretiens pour une première sélection de profils, pas mal de conversations téléphoniques et de suivi de dossiers”, détaille-t-elle.

Des missions au quotidien qui lui paraissent toujours plus routinières et de moins en moins épanouissantes ; elle ne se voit donc pas faire ce type de métier toute sa vie : “J’ai un peu fait le tour de mon travail et mes tâches”, précise-t-elle.

Elle ne s’imagine pas non plus faire toute sa carrière au Luxembourg : “Ce n’est pas le pays qui me fait le plus rêver. Certes financièrement, je ne crache pas dessus, mais j’aimerais plutôt partir ailleurs, idéalement en Suisse ou au Canada par exemple”, confie-t-elle.

Pour Corinne, le Grand-Duché offre en effet peu d’opportunités de développement au niveau RH : “On trouve beaucoup de postes de recruteurs pour les besoins d’autres PME, grands groupes ou institutions européennes. Mais en termes de métiers RH purs et généralistes, c’est un peu plus compliqué”, note-t-elle. “Pour sortir de ce milieu, il faut donc avoir beaucoup de chance. Il faut aussi être carriériste pour réussir”.

Si elle quittait le pays, elle souhaiterait devenir RH Officer, un métier un peu plus varié et constructif, selon elle : ”On fait du recrutement, de la gestion de personnels et de carrières ; on met en place des plans de formation et des programmes d’évaluation de compétences ; on organise des événements de recrutement, et on est présent sur des salons”.

Des missions dans lesquelles elle voit une finalité, et qu’elle considère comme plus constructives et plus valorisantes, tant pour elle que pour le personnel.

Une soif d’ailleurs

J’ai une soif d’ailleurs. Je n’ai pas eu la chance de pouvoir partir étudier à l’étranger via un programme Erasme ; j’aurais dû pour cela prendre un crédit, et je ne me voyais pas débuter ma carrière professionnelle avec des dettes sur le dos”, se rappelle-t-elle. ”Je suis donc toujours restée dans la même région. Maintenant, j’ai besoin de changer d’air et de voir du nouveau”.

Pour l’instant, elle met de l’argent de côté ; en attendant d’avoir suffisamment épargné, pour partir, et, une fois sur place, se trouver un appartement avant d’entamer des recherches d’emploi.

Paradoxalement, alors que dans son métier de tous les jours, elle est en contact avec des candidats et des employeurs du monde entier – via Internet, les sites d’emplois et les réseaux sociaux – elle n’ose pas effectuer ces démarches pour elle-même : “Une fois là-bas, je pourrais certainement plus facilement faire des recherches et des rencontres, passer des entretiens et trouver un emploi”, justifie-elle.

Pas prête psychologiquement

Inconsciemment, elle l’avoue, elle n’est pas encore prête psychologiquement pour effectuer le grand saut dans l’inconnu : “Je me pose trop de questions. Je suis comme cela. Je suis trop dans la retenue”, admet-elle. ”Je suis une personne qui a besoin de sécurité avant de se lancer ; je viens d’une famille d’ouvriers, et je ne souhaite pas connaître les galères financières qu’ont connues mes parents”.

En attendant, elle compte bien rester à son poste actuel, et acquérir un maximum d’expérience professionnelle, avant de trouver un emploi qui correspond plus à ses aspirations : ”Même si je ne suis pas hyper-épanouie actuellement, je n’ai pas le droit de me plaindre, car pour le moment, je gagne de l’argent, et je peux vivre décemment et payer mon loyer”, conclut-elle.