Dur, dur après près d’un an de télétravail, de retourner dans son entreprise. Décoratrice d’intérieur depuis près de 6 ans, Eléa, 36 ans, habite à Metz.

« A la frontière, ça bouchonne comme avant »

Sa voiture est devenue un outil de travail indispensable puisqu’elle y charge le matériel nécessaire pour réaliser ses aménagements intérieurs chez ses clients. Avant la crise sanitaire, elle se plaignait déjà des bouchons sur la route notamment à la frontière du Luxembourg dès 7h30 et après 17h.

Après un an de télétravail, et une reprise en douceur de son activité, elle avoue avec ambages « que rien n’a changé. Je ne sais pas si c’est une idée mais je trouve que c’est pire qu’avant ».

Elle constate que les frontaliers circulent toujours seuls dans leur voiture : « à croire que les bonnes résolutions de la pandémie n’ont pas fonctionné. Ca klaxonne pour rien et tout le temps. Dès qu’on peut faire une queue de poisson pour gagner des précieux mètres dans un embouteillage, personne ne s’en prive ».

La mobilité : « c’est le point noir quand tu travailles au Grand-Duché. Les pays frontaliers se bataillent avec le Luxembourg pour aménager les axes routiers à savoir qui va payer tels ou tels tronçons en attendant ce sont les travailleurs qui trinquent » s’insurge-t-elle « Tous les frontaliers ne sont pas de retour au travail. Je redoute sincèrement le mois de septembre, la fin du télétravail au Luxembourg ».

Contact social : la traditionnelle bise

Rien n’a changé sur la route aux heures de pointe, certes. En revanche, Eléa remarque que l’ambiance générale dans l’entreprise n’est plus la même. En commençant par la traditionnelle bise  pour saluer ses collègues. Après des mois sans contact physique, il semblerait bien que des réflexes de prudence se soient installés : « Faire la bise à quelqu’un, c’est aussi lui refaire confiance, marquer une relation de proximité entre deux personnes et après 15 mois de crise sanitaire. Pas de bises, pas de chaleur humaine ». Une petit changement que la pandémie a laissé derrière elle.

Elle alerte aussi sur une vague de lassitude qui plane au sein de sa société : « Les salariés en télétravail sont épuisés par le stress. La peur de perdre son travail, la solitude de ces mois de confinement ont plombé le moral. Beaucoup sont de retour dans l’entreprise sans avoir pris de véritables vacances. La motivation a laissé place à la démotivation ». met-elle en évidence.

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Pause déjeuner : pas vaccinée, galère !

Pour les pauses déjeuners à 12h30, Eléa ne les fait plus au restaurant, pour le moment. Toujours en attente de vaccins, elle effectue des autotests nasaux régulièrement : « Tu le fais parce que dans les restaurants, c’est devenu quasi obligatoire. Au début, c’est bien puis avec le temps, tu te décourages ».

Masques, tests PCR en cours de validité, Covid Check...de nombreux salariés préfèrent se restaurer dans l’entreprise : « Je prépare mon repas fait-maison et je prends une pause à l’extérieur, dans un espace verdoyant, au calme. C’est finalement plus simple ». La convivialité avec les collègues autour d’une agape, Eléa souhaite attendre encore un peu « A la rentrée, si nous ne sommes pas confrontés à une 4e vague en France ».

“Télétravail” ne rime pas avec “Télé”

Que retient-elle de la crise sanitaire ? Une victoire certaine, celle du télétravail. Eléa a démontré à son employeur que le télétravail ne rimait pas avec « télé comme beaucoup peuvent le penser ».

Selon elle, le gouvernement au Luxembourg devrait soutenir ce nouveau mode de fonctionnement pour le bien-être de ces milliers de frontaliers« Il faut trouver un accord entre présentiel et distanciel. La Belgique négocie actuellement 48 jours au lieu de 24 ; pourquoi ne pas faire la même chose avec la France ? ».

Dans sa vie privée, Eléa, divorcée, est maman d’une fille de 13 ans : « Je me suis rendue compte que la vie de famille était encore plus importante. Elle t’apporte un équilibre. J’ai réussi à jongler, sereinement avec ma vie professionnelle riche et ma vie de famille durant cette crise. Je ne suis plus prête à sacrifier ma vie privée comme j’avais pu le faire avant (la crise) ».

De retour à temps plein au Luxembourg en septembre, elle espère que tout le monde sortira grandi de cette expérience un peu « exceptionnelle ».

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