Paul avait pourtant « galéré » pour avoir son poste. Il avait commencé 12 ans plus tôt comme chauffeur-magasinier dans une société spécialisée dans les pièces de voiture. Il avait alors 35 ans mais on lui avait dit qu’au Luxembourg on pouvait mieux gagner sa vie qu’en Belgique ou en France et qu’on pouvait avoir de belles évolutions.

Tous les échos de l’époque se sont avérés réels. Paul a commencé en 2007 avec un salaire de 1.570 € brut. Ca correspondait au salaire minimum non qualifié de l’époque. Il faut dire qu’il n’avait pas de qualification en tant que telle mais il était passionné par les vieilles mécaniques et avait de bonnes connaissances. Un vrai autodidacte ! En Belgique, il enchainait des petits contrats d’intérim et atteignait péniblement les 1.000 euros mensuels.

Lucide, il nous explique : « Certains me disaient qu’à 35 ans j’étais exploité et que je méritais plus. Moi je suis resté réaliste. Je n’avais pas de réelle formation, juste une vraie passion pour les vieilles voitures que je restaurais. Quand on m’a proposé un poste où je pouvais manipuler des pièces autos toute la journée et aussi arrêter de galérer avec mes contrats d’intérim, je n’ai pas hésité. »

Chef des ventes à 40 ans avec 3.200 €

En 2012, cinq plus tard, à 40 ans Paul est devenu responsable en chef des ventes. On lui a confié la gestion de 9 magasiniers et chauffeur-magasiniers. Son salaire était à la hauteur de son travail. Il gagnait 3.200 euros bruts, et des avantages non négligeables comme des tickets restaurants et un véhicule de fonction.

Un poste créé spécialement pour le nouveau

Il y a deux ans, Thierry est arrivé. Jeune homme ambitieux de 27 ans, avec un BTS technico-commercial et 5 années d’expériences en France, son pays de résidence. Pour Thierry, la direction a créé un poste spécifique : Responsable des ventes de pièces dédiées aux motos. Il a d’ailleurs récupéré 2 personnes de son équipe.

Peut-être parce-qu’on ne lui a pas demandé son avis, peut-être parce-qu’il s’est senti menacé ou peut-être par jalousie… mais Paul n’a pas du tout accepté le « nouveau ». Il a eu de multiples sentiments mêlés de jalousie, de haine, et de peur aussi. Il faut dire que Thierry réussissait bien dans son nouveau job. Il s’est très vite intégré et avait de réelles connaissances techniques. A l’aise avec les outils informatiques, il était comme « un poisson dans l’eau » ajoute Paul avec un vrai sourire.

Il détestait son collègue à s’en rendre malade

Neuf mois plus tard, Paul a fini par faire une dépression. « Je ne dormais plus, je n’avais plus d’appétit, je ne bricolais même plus à la maison. La journée, quand je le voyais, j’avais mal au ventre, j’étais tellement mal. Je le détestais un peu plus chaque jour. J’ai commencé à rechercher un poste en Belgique mais y’en avait aucun pour moi et encore moins avec les mêmes conditions. »

Son médecin lui a conseillé de voir quelqu’un pour l’aider et l’a mis en arrêt deux semaines. « Je ne voulais pas tout perdre à 47 ans et risquer de me retrouver à la rue. Je suis allé voir un psychothérapeute avec toute la rage que j’avais accumulé, le désespoir plein le dos et l’envie de m’en sortir. A la première séance, j’ai parlé, parlé, parlé et j’ai pleuré. J’ai enfin pu dire à quelqu’un et surtout comprendre ce qui m’avait mis dans cet état. J’avais peur qu’il soit meilleur que moi avec son diplôme, il était plus jeune et n’avait pas dû attendre 40 ans pour avoir son poste. Il m’avait volé trois collègues…. »

En deux semaines, Paul a vu cinq fois son thérapeute. « J’ai repris mon travail, la boule au ventre mais aussi avec l’envie de savoir si je m’étais fait un film ou si j’étais toujours à ma place dans cette boite, comme m’a dit mon médecin. »

Une surprise de taille

A son arrivée, Thierry était là, déjà opérationnel comme toujours. Ce dernier lui a réservé un accueil qu’il n’est pas prêt d’oublier. Il n’avait traité que les urgences et avait hiérarchisé au mieux les tâches pour que Paul reprenne sereinement son travail. Il lui a dit une phrase à la fois banale mais qui l’a définitivement réconforté : « Il était temps que tu reviennes, c’était pas facile pour tes gars. Je ne sais pas comment tu fais pour tout faire. Il me faudra que tu m’expliques comment tu fais. »

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