Le portrait de Kelly avait initialement été publié en mars 2018.

Pour Kelly, dès le début, tout a été fluent, fluide. Son embauche en banque au terme de son stage de fin d’études, et son anglais, “très certainement ma porte d’entrée” dans l’établissement financier. A l’époque, celui-ci lui fait part d’un poste d’assistante de direction à pourvoir immédiatement.

L’étudiante manie aisément la langue de Shakespeare et fait valoir ses notions d’assistanat acquises au cours de sa licence en langue appliquée.

Frontalière à la sortie de l’école, “sans jamais avoir eu l’occasion de regarder ce qui se présentait chez nous”, Kelly se familiarise d’emblée au train-train quotidien.

Pendant une dizaine d’années, c’est tantôt par les rails tantôt via le bus qu’elle rallie le travail. “Une heure en moyenne de porte à porte”, moins quand elle use de ses propres moyens “pendant les vacances, quand le trafic est plus souple. Le reste du temps c’est fatiguant, sans compter qu’il me fallait payer la journée de parking…”

« Pas beaucoup plus de temps que pour aller à Metz »

Tombée dans la marmite très tôt, Kelly n’a jamais goûté à d’autres conditions, si bien que “la contrainte du trajet n’a jamais été un gros problème” pour elle. Même depuis qu’elle a bouleversé ses habitudes en même temps qu’elle signait un contrat pour un nouvel employeur. “Je gare ma voiture sur un parking au Luxembourg et une navette me dépose jusque devant ma boîte. C’est plutôt pratique”, apprécie l’intéressée.

Aux dires de la trentenaire, il ne lui faut que trois quarts d’heure pour faire le déplacement. “Ce n’est pas beaucoup plus que pour aller travailler à Metz par exemple”, expose-t-elle.

Si elle ose la comparaison, c’est qu’à un moment donné, la question s’est posée. Un temps sans emploi, elle songe à exercer plus proche de son domicile. Les recherches n’aboutissent pas car “rien ne collait. En toute objectivité, bien sûr que le salaire a joué.”

Avec un quart d’émolument en moins pour un job équivalent et à quasi même distance, le jeu n’en vaut pas la chandelle.

Initiation au luxembourgeois

Une remise à niveau en anglais et une initiation au luxembourgeois plus tard, elle rebondit donc au Grand-Duché. Si elle maîtrise aussi plutôt bien l’allemand, la non-connaissance du parler local peut constituer un frein dans sa profession. “Pour certains patrons, c’est rédhibitoire. C’est arrivé qu’on ne me convoque pas à un entretien car je ne parlais pas la langue.”

Au-delà de cela, la trilingue n’a jamais souffert d’aucune distinction avec ses collègues ou ses clients, si ce n’est dans les transports en commun. “Les chauffeurs de bus ne sont pas sympa, c’est un fait”, sourit-elle.

Jamais enfermée dans vie professionnelle, elle met un point d’honneur à trouver chaussure à son pied. “J’aime ce que je fais et je m’y sens bien. Mais je ne suis pas contre l’idée de travailler en France si le salaire suit et que le poste me convient.”

Quand elle apprend qu’elle a déjà ouvert ses droits de retraite, elle s’en étonne, c’est pour dire ! “Franchement je ne m’y suis jamais intéressé. J’ai le droit à combien ? Ah oui quand même !”

« Tout le monde est content comme ça »

Depuis quelques années, Kelly doit composer avec un nouveau statut, son rôle de maman. Par chance, elle peut compter sur un mari disponible, notamment pour récupérer leurs enfants le soir. “Il m’aide beaucoup donc c’est moins pesant, confie-t-elle. Parfois je souffre de ne pas pouvoir aller les chercher à l’école mais je les vois quand même au moins une heure et demi le soir.”

Nul doute qu’en cas de manque important de part et d’autre, Kelly y remédierait. “J’ai déjà demandé au plus grand s’il voyait assez papa et maman. Il m’a répondu : « Ben oui, vous êtes là tous les soirs ! »”

Résultat des comptes : “J’ai l’impression que tout le monde est content comme ça.” Après tout, la vérité sort de la bouche des enfants