Le Fond de compensation (FDC) a pour mission de gérer la réserve de compensation du régime général de pension et d’en tirer un rendement effectif tout en diversifiant les risques. Il a été constitué en 2004. Il s’inscrit dans la perspective de faire bénéficier la réserve de compensation de l’évolution des marchés financiers en diversifiant les actifs dans un portefeuille tenant à la fois compte de critères stricts de risque et de rendement.

Un changement de paradigme s’impose

Le Fonds de compensation (FDC) du régime général de pension a été instauré en 2004 pour gérer activement la réserve grossissante du régime général de pension par un recours pratiquement exclusif aux marchés financiers. Le lancement du FDC avait coïncidé en 2004 avec la création du Fonds spécial dit Kyoto, autour du système européen d’échange de quotas d’émission (ETS) pour lutter contre le changement climatique.

Le cadre politique national a évolué au fil du temps et la lutte contre le changement climatique s’inscrit dès à présent dans le cadre de l’Accord de Paris à la COP21. Pourtant la stratégie d’investissement du FDC reste jusqu’à présent empreinte d’une certaine inertie face à l’extrême urgence climatique. En déviant de l’objectif d’un réchauffement limité de préférence à 1,5°C par rapport au niveau préindustriel fixé par l’Accord de Paris, le FDC se positionne en sévère contradiction avec les efforts conjoints du gouvernement et des citoyens luxembourgeois en vue d’atténuer le changement climatique, que ces derniers ressentent dorénavant directement à leur porte.

Ainsi, par exemple, le revenu de 1,13 milliard généré en 2020 par les placements du FDC sont à relativiser par la valeur des dégâts climatiques subis au Luxembourg qui s’élèvent, selon les estimations partielles de la Cour des comptes luxembourgeoise, à 522 millions d’euros sur la période 2016-2021. Si ces chiffres démontrent à quel point la lutte climatique représente l’urgence la plus criante, d’autres priorités ne doivent pas être oubliées lors des décisions d’investissement du FDC, notamment en termes d’impact social (droits humains, sociaux et civils).

Le FDC est en train de renouveler sa stratégie d’investissement pour la prochaine période quinquennale. À l’heure de ce bilan intermédiaire et face aux considérations qui précèdent, une discussion politique pour arriver à un changement de paradigme quant à l’utilisation de la réserve du régime général de pension est nécessaire. Sous l’impulsion des représentants des deux syndicats ayant la représentativité nationale globale OGBL et LCGB, nommés par la Chambre des salariés (CSL) pour représenter les intérêts des assurés au sein du Conseil d’administration du FDC, la CSL a décidé de se positionner sous forme d’une résolution visant à appeler le Gouvernement à revoir le cadre légal et les missions du FDC.

Renforcer sérieusement les critères d’investissement

L’accord de coalition actuel affiche à plusieurs endroits sa volonté d’agir en matière de durabilité, mais il conforte en même temps le cadre légal relatif à la gestion de la réserve de la CNAP, inchangé depuis 2004. Aux yeux de la Chambre des Salariés Luxembourg, ce cadre légal est dépassé. Il convient de rendre proactive et cohérente à la fois la législation et la stratégie d’investissement du FDC avec les objectifs nationaux et internationaux du Grand-Duché.

Selon les Nations Unies, les acteurs institutionnels, à l’instar du FDC, doivent inclure dans leurs décisions d’investissement les facteurs de valeur à long terme, qui comprennent les critères ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance), sans quoi ils contreviennent à leur obligation fiduciaire. C’est pourquoi la CSL exige que les critères de sélection des investissements consentis soient définis de manière beaucoup plus restrictive et que des benchmarks appropriés soient utilisés pour vérifier les performances globales du FDC. La CSL appelle le gouvernement à respecter et à mettre en œuvre son accord de coalition, qui prévoit aussi « d’élaborer et d’appliquer des directives claires au sujet de l’orientation des investissements vers le secteur de la finance verte et durable. À ce sujet, un dialogue sera entamé avec les partenaires sociaux et la nécessité d’une modification de la législation sera analysée. »

Repenser l’utilisation qui est faite des moyens pécuniaires du FDC

La réserve de 23 milliards d’euros détenue par le FDC en fin d’année 2020 représente à elle seule 43% du total des avoirs financiers des Administration publiques et constitue l’équivalent de ce que l’Administration centrale aura consenti en investissements publics entre 2010 et 2022 !

Une accumulation de la réserve du régime général de pension risque cependant de servir comme une fin budgétaire en soi au lieu de garantir une pérennisation du système de pension. En effet, le niveau actuel de la réserve s’élève à 4,8 fois des dépenses annuelles de prestation, mais elle pourrait être épuisée en 2043, selon les dernières projections officielles disponibles. À long terme, le FDC ne pourra donc jamais réussir sa mission principale qui consiste à « garantir la pérennité du régime général de pension ».

Une contribution du FDC à un réchauffement climatique bien supérieur à 1,5 degré dans l’accomplissement de cet échec n’est ni utile ni durable. Il est donc d’autant plus discutable que la stratégie d’investissement du FDC prévoit un rendement minimum cible annuel moyen de 2,2%. Plutôt que de poursuivre des rendements conformes au marché, sans grands d’égards aux conséquences climatiques, écologiques, sociales et humaines de son action, la CSL invite les pouvoirs publics à se servir de la réserve pour développer une stratégie d’investissement dans l’économie nationale et ses salariés et citoyens. À titre d’exemple, l’accord de coalition indique qu’il conviendrait de développer les investissements du Fonds de compensation dans le logement locatif à coût modéré. En outre, des synergies pourraient notamment être créées entre le FDC et la Société Nationale de Crédit et d’Investissement (SNCI) pour faire face aux défis et besoins publics annuels en investissements pour assurer la transition écologique au Luxembourg.

L’impact financier annuel est actuellement évalué à 5 milliards d’euros supplémentaires aux 3,1 milliards déjà consentis en 2021. Pour conclure, la CSL pourrait même s’imaginer à élargir cette stratégie à l’échelle de la GrandeRégion. La crise sanitaire due à la pandémie de la covid-19 a rappelé quelles sont les interdépendances qui lient le Luxembourg et ses proches voisins. Un investissement dans le développement de l’espace transfrontalier de la Grande Région pourrait en faire un espace commun de vie, d’emploi, de prospérité, de bien-être et de solidarité.

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