« Ne cherchez pas le bonheur partout, il est peut-être à côté de vous. » En ces temps où les téléfilms de Noël commencent à s’inviter sur les grilles des télévisions, on serait tenté de croire que l’adage évoque ici une amourette pleine de bons sentiments entre deux tourtereaux.

En l’occurrence, l’idylle relève plutôt d’un crush professionnel et contextuel entre une Mosellane néophyte sur le marché du travail et le Grand-Duché.

Durant les trois années de son cursus d’infirmière, Mathilda a eu tout loisir d’effectuer des stages, une dizaine, au sein de cliniques françaises et étrangères.

A tel point qu’une fois le diplôme en poche, la suite du parcours est tombée comme une évidence. « Je me suis dit, ‘il faut que j’aille au Luxembourg, coûte que coûte’» Cela tombe bien, son paternel y réside, ce qui lui retire une (grosse) épine du pied.

« Vous ne pouvez pas soigner sans comprendre la langue »

L’enthousiasme de Mathilda va bien au-delà des seules intentions vénales, loin s’en faut, même si les standards luxembourgeois envoient valser les français dans les cordes.

La jeune femme cultive depuis des années une passion pour les langues étrangères. « Le Luxembourg, c’est mix de tout ça, c’est parfait. »

Alors à peine refermée la porte de l’université qu’elle démarre des cours de luxembourgeois. « J’avais des bases en allemand, cela m’a bien aidé au début. Maintenant, cela m’induit en erreur car les mots se ressemblent, sourit-elle, avec un an de pratique dans la besace. Par la suite, plutôt que d’être parfaitement bilingue, je m’orienterai vers l’apprentissage d’un vocabulaire en lien avec ma profession. »

Exercer le « plus beau métier du monde » au pays, en tant qu’étrangère, nécessite en effet, et au premier ordre, des efforts redoublés linguistiquement parlant. « Vous ne pouvez pas soigner des patients si vous ne comprenez pas ce qu’ils vous disent. D’autant que les personnes âgées ne parlent parfois que le luxembourgeois ou l’allemand. »

« Les embauches fonctionnement beaucoup au piston »

Après quelques mois de prospection, elle est engagée dans un laboratoire. Une expérience positive même si pas le nec plus ultra pour une infirmière qui apprécie le contact avec les gens et les responsabilités. « Ce n’est pas simple d’entrer dans ce milieu au Luxembourg. Déjà, il faut avoir une équivalence pour le diplôme. Ensuite, les débutants sont rarement acceptés. Et puis, les embauches fonctionnent beaucoup au piston. » Elle ne croyait pas si bien dire.

C’est par un heureux hasard qu’elle a pu intégrer la société privée de soins à domicile qui l’a fait signé un CDD, qui s’est d’ailleurs transformé quelques mois plus tard en CDI. « J’ai acheté ma voiture à une infirmière qui m’a obtenu un entretien. »

Compétences et motivations ont achevé de convaincre l’employeur. Belle histoire jusqu’au bout puisqu’il n’est pas rare « que le CDD dure longtemps avant d’obtenir un poste fixe. »

« Entre 2.800 et 3.300 euros nets »

Embauchée à 32h/semaine, sa rémunération oscille « entre 2.800 et 3.300 euros nets par mois. C’est plus ou moins l’équivalent d’un salaire d’infirmière en fin de carrière en France. Et pour commencer, c’est plutôt 1.500 euros… »

Mathilda ne boude évidemment pas son plaisir d’autant que les conditions de travail sont largement plus appréciables au Grand-Duché. « En France, on est toujours en sous-effectif, les médecins ne nous considèrent pas. Ici, on est beaucoup plus respecté et suffisamment en nombre. »

Indépendante financièrement, elle se met donc en quête d’un logement… en France. « Je voulais au Luxembourg mais les loyers sont beaucoup trop chers ! »

Et on parle d’un écart du simple au double pour une surface similaire. « En me renseignant, et encore pas dans la capitale, je suis tombé sur des biens à 1.000/1.400 euros ! En France, j’ai trouvé quelque chose de très bien pour la moitié du prix. »

Elle est certes plus éloignée mais préfère « faire 15-20 minutes de route que de [se] ruiner en logement ». Qui plus est, ses horaires matinaux lui épargnent, en théorie, les heures de pointe.

En somme, la néo-frontalière s’imagine bras dessus, bras dessous avec son Luxembourg pendant un bon bout de temps, peut-être même indéfiniment. Un vrai conte de Noël.