Lors de sa dernière assemblée plénière, la Chambre des salariés (CSL) a avisé le projet de loi modifiant les conditions d’octroi de l’allocation familiale suite à une énième condamnation du juge européen. Elle tient à informer les frontaliers sur un sujet sensible et “discriminatoire” selon elle. 

En vertu des dispositions légales actuelles, les bénéficiaires des allocations familiales sont les enfants résidant au Luxembourg ainsi que les enfants biologiques et adoptifs des salariés (ou retraités) frontaliers.

Il en résulte que tous les enfants résidant au Luxembourg, y compris les enfants du conjoint du salarié, mais qui ne sont pas ses enfants propres, ont le droit de percevoir une allocation familiale.

Or, seuls les enfants biologiques ou adoptifs du salarié frontalier non-résident ouvrent droit à ladite allocation, alors que les enfants du conjoint nés d’une relation antérieure sont exclus, ce qui a été considéré par la Cour de justice de l’UE (CJUE) comme une discrimination indirecte fondée sur la nationalité.

L’avis peut être consulté sur www.csl.lu.

Un projet de loi anachronique…

La CJUE a demandé au Luxembourg de se conformer à la définition européenne des« membres de la famille » qui englobe les enfants du conjoint ou du partenaire avec lequel le citoyen de l’Union a contracté un partenariat enregistré.

Or, complètement à contre-courant et sans remords, le projet de loi restreint le cercle des bénéficiaires des allocations familiales en les accordant uniquement aux parentsbiologiques ou adoptifs d’un enfant, y compris pour les enfants résidant sur le territoire luxembourgeois.

La CSL estime que la sécurité sociale en général et plus particulièrement les allocations familiales doivent tenir compte des nouvelles typologies de familles (familles recomposées notamment).

La CJUE l’a fait dans différents arrêts, notamment l’arrêt Depesme, qui a contraint le gouvernement luxembourgeois à revoir les conditions d’attribution des bourses d’études, afin que les enfants du conjoint ou du partenaire du travailleur frontalier soient considérés comme les enfants de celui-ci et puissent aussi avoir droit aux aides financières pour études supérieures.

En outre, ce projet de loi constitue un retour en arrière. Si, au début de la mise en œuvre de la politique familiale luxembourgeoise, les prestations familiales étaient versées aux parents pour pallier la charge financière que représente l’arrivée d’un enfant, il a ensuite été décidé que l’enfant devait être au centre de toute aide familiale ; ce qui est, selon la CSL, une bonne approche.

Pourtant avec ce texte, c’est un changement radical de paradigme qui s’opère à nouveau : l’enfant n’est plus au centre du processus mais bien ses parents qui deviennent les garants de l’octroi ou non des prestations familiales.

… et toujours discriminant

La refonte des articles applicables est excessive par rapport à cet arrêt et ne supprime qu’en apparence la discrimination à l’égard des frontaliers, tout en en créant d’autres. Pour notre Chambre, doit simplement être prise en compte la définition des « membres de la famille » telle qu’elle résulte du droit de l’Union européenne, afin de ne pas discriminer les familles recomposées, sous peine de nouvelle condamnation du Luxembourg par le juge européen.

Or, les auteurs du projet de loi indiquent d’ailleurs eux-mêmes que pour les résidents, les nouvelles dispositions ne changent de fait pas la situation ; ce serait donc uniquement les salariés frontaliers qui seraient touchés.

Ainsi, au lieu de valoriser la diversité et de générer inclusion, coopération et solidarité au niveau de la Grande Région, ce texte propage un discours discriminant.

Par ailleurs, concernant également les résidents, la situation des salariés à statut précaire, notamment les salariés intérimaires, risque de se dégrader ; elle doit être prise en considération de manière spécifique afin de protéger les enfants de ces salariés.

De même, deux parents étudiants résidents doivent pouvoir continuer à bénéficier des prestations familiales pour leurs enfants, ce qui ne sera plus possible avec ce projet de loi.

Le gouvernement ne tient pas ses engagements au niveau de l’indexation de toutes les prestations familiales. 

Le projet de loi réintroduit l’indexation des allocations familiales, ce qui est en principe louable, mais il manque une partie des promesses du gouvernement.

À cet égard, la CSL dénonce toutefois le fait que le gouvernement ne tient pas ses engagements.

Un accord a été signé en 2014 avec les syndicats au sujet de l’adaptation des prestations familiales !

La CSL demande ainsi non seulement la réindexation des montants en question mais également une augmentation structurelle tenant compte de la perte depouvoir d’achat depuis 2014 au moins. Le summum étant que le projet de loi est libellé de telle manière qu’une éventuelle tranche indiciaire tombant avant la fin de l’année 2021 ne serait même pas prise en compte.

Finalement, le gouvernement ne respecte pas non plus son propre accord de coalition, puisque dans celui-ci, il est prévu d’indexer toutes les prestations familiales, et pas uniquement les allocations familiales !

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