Si vous résidez actuellement ou résidiez il y a peu avec votre conjoint sur le territoire luxembourgeois, et que vous êtes sur le point d’introduire une procédure en divorce ou êtes dans un contentieux familial, cette nouvelle législation vous intéresse. Nous en développons pour vous les traits majeurs.

L’introduction du juge aux affaires familiales

A l’instar de la France, le Luxembourg connaîtra, à partir du 1er novembre 2018, l’institution du Juge aux Affaires Familiales (JAF). Il s’agit d’un juge unique, spécialisé, institué au sein des tribunaux d’arrondissement, et amené à connaître de toutes les demandes relatives au droit de la famille, telles que les demandes en divorce, celles concernant la situation des enfants, ou encore celles relatives à l’autorité parentale, aux pensions alimentaires, etc…

Le Juge aux Affaires Familiales est donc désormais compétent pour connaître de tout le contentieux familial, qui était auparavant réparti entre différentes juridictions. Ce juge unique sera amené à suivre les familles au fur et à mesure des problèmes qu’elles pourraient rencontrer, et apprendra ainsi à les connaître. Cela permettra de trouver plus efficacement et plus rapidement des solutions adaptées à chacune d’entre elles.

Par ailleurs, s’agissant d’un juge spécialisé, statuant seul, et suivant une procédure principalement orale encadrée dans des délais stricts, la réforme se marque encore davantage par une accélération du traitement des dossiers devant les tribunaux. Le JAF pourra être saisi par une simple requête à déposer au greffe du tribunal d’arrondissement, sans avoir besoin de se faire assister par un avocat. En cas d’appel contre une décision du JAF cependant, le recours à l’avocat est obligatoire.

L’abolition du divorce pour faute

A l’instar du droit belge, il n’existera au Luxembourg plus que deux formes de divorce :

    • Le divorce par consentement mutuel, dont la procédure reste quasiment inchangée par la nouvelle loi, l’assistance d’un avocat n’étant toujours pas obligatoire.
    • Le divorce pour rupture irrémédiable des relations conjugales qui nécessite le recours à un avocat.

Jusqu’à présent, et sauf consentement mutuel des époux sur tous les aspects du divorce, le conjoint voulant obtenir le prononcé de son divorce devait prouver un manquement de l’autre conjoint aux devoirs du mariage. Désormais, le prononcé du divorce est conditionné par l’accord des conjoints sur le principe du divorce, ou, à défaut d’accord, par la volonté maintenue du conjoint demandeur, à l’écoulement d’une période de réflexion qui ne pourra en aucun cas dépasser six mois. Finis donc, les éternels et éprouvants débats au cours desquels les époux devaient s’escrimer à établir la preuve de la faute de leur conjoint.

Si la faute n’intervient plus comme cas d’ouverture du divorce, certains comportements graves gardent toutefois une incidence sur les conséquences du divorce. Ainsi par exemple, celui des époux qui se sera rendu coupable à l’encontre de son conjoint ou d’un enfant vivant sous le même toit, d’infractions pénales graves (telles qu’un attentat à la pudeur, un viol, ou encore des coups et blessures), ne pourra notamment plus se voir attribuer de pension alimentaire et pourra aussi être déchu de l’autorité parentale.

De nouveaux critères pour l’évaluation de la pension alimentaire

Si le principe selon lequel la pension alimentaire est fixée en fonction des besoins du créancier et dans la limite des facultés contributives du débiteur, cette pension ne se définit plus comme le minimum nécessaire pour vivre. La nouvelle loi prévoit en effet plusieurs nouveaux critères permettant de tenir compte de la répartition des tâches et du mode de vie des conjoints durant le mariage (temps consacré à l’éducation des enfants, disponibilité pour de nouveaux emplois, etc…).

Le principe n’est cependant toujours pas celui du maintien du niveau de vie après le divorce. Autre nouveauté marquante : à l’instar du droit belge, la période durant laquelle un conjoint peut bénéficier d’une pension alimentaire est limitée à la durée du mariage, sauf, par exception, au débiteur de démontrer qu’à l’expiration de la durée d’attribution, il reste, pour des raisons indépendantes de sa volonté, dans un état de besoin.

La pension alimentaire demeure toutefois toujours révocable et révisable en fonction de l’évolution de la situation des parties dans leurs besoins ou dans leur capacité financière.

Cette nouvelle législation a dès lors le mérite de conférer au droit de la famille un caractère plus humain en favorisant des relations davantage personnalisées entre le juge aux affaires familiales et les familles, en accélérant la prise de décision relative aux litiges familiaux et en mettant fin à ce trop lourd contentieux du divorce pour faute, qui avait pour fâcheuse tendance d’échauffer les esprits et de contraindre bien souvent les époux à devoir étaler leur vie privée sur la place publique.

Me Pascal PEUVREL, Avocat à la Cour : [email protected]

Me Estelle BURET, Avocate