Cela fait maintenant plus de 20 ans que la France en parle. Le prélèvement à la source de l’impôt qui devait entrer en vigueur au 1er janvier 2018, sera finalement repoussé à 2019. En attendant, le sujet provoque toujours de nombreuses discussions dans l’hexagone et il est loin de faire l’unanimité.

L’employeur va connaître les revenus de mon couple“, “les impôts vont augmenter“, “il n’y aura plus de confidentialité“, “je ne pourrai plus être exonéré d’impôt“, “mon salaire va baisser“… Voilà en substance les craintes des Français qui visiblement craignent ce changement fiscal.

Au Luxembourg, le système de retenue d’impôt à la source se pratique depuis de nombreuses années, aussi bien pour les résidents que pour les frontaliers. On a donc voulu savoir ce que pensaient les contribuables de ce système et comment ils percevaient les discussions côté français.

Simple, rapide, efficace

Fred a toujours vécu et payé ses impôts au Luxembourg : “Je suis content de ne pas avoir à faire une grande réserve d’argent, et de ne pas avoir à payer une grosse somme en fin d’année.
Comme je déclare un revenu unique, les formalités de déclaration d’impôt sont assez simples pour moi. Une fois ma déclaration envoyée, je reçois de l’argent en retour de l’Administration des contributions. Au final, ce n’est pas beaucoup de travail, c’est simple, relativement rapide et efficace
”.

Le patron n’aura pas plus d’information qu’avant

Carine, la cinquantaine, est assistante du personnel. Pour elle, le patron n’en saura pas plus : “Pour le calcul du barème, il peut certes savoir si le salarié est marié ou non, s’il a des enfants ou non, précise-t-elle. Mais le simple fait de savoir si vous avez des enfants ou non, que vous êtes mariés ou non… Ce ne sont pas des informations confidentielles. Avec le temps, votre employeur et vos collègues l’apprendront d’une manière ou d’une autre.

Pour ce qui concerne les autres sources de revenus (du capital, foncier ou autre), cela n’intervient pas dans le calcul de la retenue à la source. Le patron ne saura donc rien sur vos revenus supplémentaires”.

Pas de grand changement pour les patrons

Toujours selon Carine, le passage à la retenue à la source n’apportera pas une grande surcharge de travail aux employeurs français : “Pour eux, cela fonctionnera de la même manière que pour les cotisations sociales, qu’ils prélèvent déjà avant le versement du salaire. Ce ne sera qu’une tâche supplémentaire, rien de bien compliqué, explique-t-elle.

Tout comme les fiduciaires luxembourgeoises qui s’occupent de ces formalités, ce seront les comptables qui s’en chargeront. Pour cela, ils ont un programme dédié, qui fait le calcul de tous les prélèvements à la source“.

Moins de salaire, mais toujours quelque chose à récupérer en fin d’année

Sylvie, une trentenaire chargée de clientèle dans une banque, a autrefois travaillé en France : “Quand je vois le fonctionnement actuel en France et au Luxembourg. C’est beaucoup mieux au Grand-Duché. Mon salaire est certes moindre à la fin du mois, mais je récupère toujours quelque chose à la fin de l’année, observe-t-elle.

Alors qu’en France, je touchais mon salaire plein. Mais au mois de septembre, je devais débourser plus qu’un salaire entier pour les impôts, ce n’était pas toujours facile”.

Elle voit toutefois un seul bémol, concernant le nouveau dispositif qui devrait entrer en vigueur en 2019 : “Je peux m’imaginer que ce sera plus difficile pour les faibles revenus, qui verront leur salaire directement ponctionnés, et qui auront certainement plus de difficultés à boucler leurs fins de mois”, prévoit-elle.

Les bulletins de salaires français : une usine à gaz !

Xavier, la mi-cinquantaine, est commerçant. Il a longtemps été indépendant puis chef d’entreprise en France, avant de venir s’établir au Luxembourg. Lui aussi a eu l’occasion de comparer les deux systèmes d’imposition sur le revenu.

Selon lui, les formalités de déclaration fiscales sont plus simples au Luxembourg. Il attend de voir, si, et comment, la France simplifiera le dispositif fiscal : “Quand vous comparez une fiche de paie française à une fiche de paie luxembourgeoise, il y a un écart énorme, en nombre de lignes : la complexité de la fiscalité française se reflète directement sur la fiche de paie“. Pour Xavier, les prélèvements se sont accumulés, avec le temps, sur les bulletins de salaires français, au point que ces derniers sont devenus selon lui “une véritable usine à gaz“.

Donc si on simplifie le prélèvement et la déclaration d’impôt, et si en parallèle, on simplifie la fiche de paie, tout le monde y gagnera. Car on passe beaucoup trop de temps à faire de la paperasse, et au final, pendant ce temps-là, on ne travaille pas !“.

La retenue à la source : un argument pour recruter

Enfin, Jean, la quarantaine, informaticien, a été actif en France et a lui aussi payé ses impôts d’un coup. Maintenant qu’il est salarié au Luxembourg, il apprécie cette déduction mensuelle. À aucun prix, il ne souhaite revenir au système français.

Régulièrement, il scrute le marché de l’emploi au Grand-Duché. Et depuis quelque temps, il remarque que la déduction à la source devient un argument mis en avant par les recruteurs, pour attirer les talents étrangers au Luxembourg.