Marc, 24 ans, est agent de sécurité au Luxembourg depuis 2010. Habitant en périphérie de Metz, le jeune homme nous en dit un peu plus sur le chemin qui l’a mené jusqu’au Grand-Duché : “Après un bref passage en seconde STG, explique-t-il, je me suis rendu compte que les études n’étaient pas vraiment pour moi. Je voulais gagner rapidement de l’argent, j’ai donc décidé de passer un diplôme qui me permettrait de rentrer au plus vite dans la vie active“.

Après une formation CAP prévention et sécurité, Marc tente sa chance en répondant à une offre d’emploi du Casino de Mondorf-les-Bains. Avec succès. “Deux semaines après mes examens, j’ai été embauché sans avoir les résultats ! J’ai passé trois ans à Mondorf, j’y ai fait mes premières armes, j’en ai retiré beaucoup d’expérience“.

Aujourd’hui – après avoir eu besoin de “changer d’air“- Marc officie dans une société de sécurité luxembourgeoise. Son savoir-faire, c’est au sein d’une institution européenne qu’il le met concrètement en œuvre. Concernant le salaire, Marc précise : “Un agent de sécu’ débutant sa carrière au Lux’ est soumis à la convention collective du gardiennage et touche 1970 euros par mois, nets. Il faut prendre aussi en compte les primes pour les dimanches/nuits/jours fériés. Le salaire peut vite grimper. Moi, j’en suis à 2033 euros de base, mais je tourne en moyenne, avec les 3:8 , à 2.500 euros par mois. En France, un agent faisant le même rythme de travail que moi toucherait à peine 1.300 euros. La différence, elle est là“.

“Tout le monde a un peu peur pour sa place”

Pour autant, selon lui, tout n’est pas rose de l’autre côté de la frontière : “Sur mon lieu de travail, le client souhaite réduire les effectifs car l’enveloppe budgétaire est en diminution. Tout le monde a un peu peur pour sa place. Je pense aussi que les Français sont victimes d’un peu de discrimination par les Luxembourgeois qui pensent que nous profitons de système ou que nous volons leur travail… alors que beaucoup de nos compétences et diplômes n’existent pas au Lux’ ! Ce n’est pas un hasard si la plupart des agents de sécurité sont français“.

Quand on lui demande un exemple concret qui illustrerait cette discrimination qu’il pointe du doigt, Marc ne perd rien de son aplomb : “J’ai pu voir des employés luxembourgeois arriver alcoolisés au travail ou commettre des fautes graves, sans jamais être inquiétés… car ils étaient luxembourgeois“.

Mais notre agent de sécurité reste lucide : “Je pense que oui, heureusement que le Luxembourg est là. Même si les Luxembourgeois ont un caractère très spécial, et ne savent pas rouler ! (rires). Malheureusement, cette population ne connaît que les bureaux et le monde de la finance, ils ne pratiquent pas assez le terrain. Les Luxembourgeois pures souches sont quasiment en minorité dans leur pays et ils prennent tout le monde de haut… Après, je ne les fréquente pas assez pour vraiment les juger, mais c’est mon ressenti“.

200 euros de diesel/mois

Si le salaire constitue la raison principale pour laquelle Marc s’est tourné vers le Grand-Duché, elle n’est pas la seule. “Je trouve qu’au Lux’, tout est beaucoup plus sérieux, plus carré, continue-t-il. On doit être irréprochables, comparé à la France. Après je pense que comme quasiment tous les frontaliers, je suis au Lux’ car cela fait plus rêver et ça rapporte plus“.

Au niveau des transports, Marc est un aficionados de la voiture : “La voiture reste un confort individuel dont je ne pourrais pas me passer, affirme-t-il, surtout que je fais les 3:8. C’est surtout à cause des horaires que je fais en fait, elles ne me permettent pas toujours d’avoir un bus ou un train. Mon budget diesel par mois est d’environ 200 euros. Heureusement que mes horaires ne sont pas ceux des bureaux et que j’ai tout le loisir de rouler sur des routes dégagées !“.

Un quotidien à 100 à l’heure

Au niveau du rythme de vie, Marc tient le coup malgré des journées chargées : “En combinant mon travail au Lux’ et mon statut de pompier volontaire en France, c’est peu dire que de dire que mon rythme de travail est fatigant. Une journée type pour moi : lever à 4h15, boulot à 5h30 jusque 13h30, maison à 14h15, sieste, puis pompiers de 17h à 23h”.

La vie privée, forcément, en accuse un coup… que Marc sait relativiser : “Ma copine se plaint souvent de me voir travailler les week-ends, ou la nuit, nous rapporte-t-il. Mais je lui réponds que le travail est une contrainte nécessaire pour subvenir à nos besoins et qu’au final, en regardant la fiche de paye, on peut avoir le sourire et se dire qu’à la fin du moins nous n’aurons pas besoin de nous serrer la ceinture“.

Pour lui, il n’y a pas photo, le Luxembourg l’emporte sur la France : “La différence de sérieux, la compétence des gens… C’est beaucoup mieux ici, le niveau est plus élevé, on nous en demande toujours plus car les clients sont très exigeants et veulent les meilleurs – surtout dans les institutions européennes comme la mienne”. Il ajoute encore : “En France, l’argent est tabou. Quand je parle de mon salaire à ma famille, ils me regardent avec de grands yeux, exactement comme mes amis. J’ai l’impression de venir d’une autre planète. Au Lux, on discute des salaires et on ne se prive pas de rouler en BMW, Audi, ou de s’acheter une TV à 1.500 euros. C’est normal“.

Le mot de la fin, Marc ? : “Je prie tous les jours… pour ne pas travailler en France“.