Nous vous proposons un article paru ce 1er avril dans le journal français Les Echos, qui donne des explications sur le pic, donc la progression et ainsi la fin de l’épidémie. La France, proche du Luxembourg et de la Belgique quant à la prise de décisions des gouvernements respectifs pour l’application du confinement, d’une part ;  et d’autre part quant à l’évolution de la pandémie.

Tout le monde veut savoir quand on pourra à nouveau sortir….

Mais où est le pic ?

Avec le coronavirus, les soignants et les pouvoirs publics sont un peu comme des alpinistes gravissant une montagne dont on ne distingue pas la cime. Certains prédisent que le nombre de nouveaux cas va cesser d’augmenter cette semaine, d’autres, la suivante. Rien de plus incertain.

Certes, des scientifiques ont créé des modèles mathématiques et projeté des scénarios épidémiques. Mais la sortie de crise est encore très difficile à prévoir, parce que le confinement est une expérience inédite dont on ne connaît pas bien l’efficacité. D’autant que le Covid-19 n’a pas encore livré tous ses secrets.

Du confinement, on attend qu’il fasse baisser le taux de reproduction du virus de trois personnes à moins d’une personne contaminée par malade pour « casser » l’épidémie.

La transmission du virus semble plus forte en Europe qu’à l’échelle mondiale, où un malade contamine plutôt 2,5 personnes, observe Simon Cauchemez, modélisateur à l’Institut Pasteur. « Il faut diminuer le taux de contact entre les gens de 60 %, c’est énorme », souligne ce membre du comité scientifique qui conseille le gouvernement. Or, ces quinze dernières années, « les travaux menés sur les pandémies n’ont pas du tout envisagé l’hypothèse du confinement généralisé », rappelle-t-il.

  • Citation ” On commence à voir frémir la courbe des hospitalisations, qui est un peu en dessous de celle que nous avions projetée. Mais ces résultats sont encore trop fragiles, on est dans la marge d’erreur.” PASCAL CRÉPEY Epidémiologiste

L’interdiction de sortir de chez soi est entrée en vigueur le mardi 17 mars en France, soit depuis deux semaines. Sachant que l’incubation du virus dure en moyenne 5-6 jours, mais que l’aggravation de la maladie survient généralement une semaine plus tard, on devrait commencer à en mesurer les effets.

Contagion présymptomatique

Ce chercheur et ses confrères Clément Massonnaud et Jonathan Roux ont montré il y a deux semaines que les capacités de réanimation risquaient d’être débordées dans toutes les régions avant la fin avril, et qu’il pourrait y avoir à la mi-avril entre 1.000 et 11.000 morts du Covid-19 si rien n’était fait – et des centaines de milliers de morts si l’on prolongeait la courbe jusqu’à ce que le virus s’épuise.

Or, malgré les restrictions de circulation, il y a déjà eu plus de 1.000 décès dans le pays. De plus, l’Ile-de-France a dépassé depuis le 26 mars sa capacité initiale de réanimation (1.200 lits), alors que dans le modèle sans confinement, elle était censée tenir jusqu’en avril.

Les prévisions ont sans doute été optimistes parce qu’on ne savait pas encore il y a deux semaines que les personnes infectées étaient contagieuses avant l’apparition des symptômes. Le virus a donc progressé en « sous-marin » pendant des semaines. « Cela change la dynamique de l’épidémie, et ça rend la maladie très difficile à contrôler puisqu’on ne peut pas tester tout le monde », explique Pascal Crépey.

Le risque d’une deuxième vague

On ne voit pas le pic, et à plus forte raison on ignore ce qui se passe sur l’autre versant de la montagne coronavirus : la sortie de crise. « La grande question est de savoir combien de personnes sont infectées mais ne présentent pas de symptômes », selon Simon Cauchemez.

Les scénarios pris en compte par les modélisateurs partent du principe qu’environ la moitié des cas sont asymptomatiques. Mais certains chercheurs estiment qu’ils sont encore plus nombreux. « Y a-t-il plus d’infections asymptomatiques ? Est-on plus avancé dans l’épidémie qu’on ne le croit ? Dans ce cas, le risque d’une deuxième vague épidémique serait plus faible », explique le scientifique.

Mais Simon Cauchemez ne croit pas vraiment à cette hypothèse heureuse : « Je serais très surpris qu’une grande proportion de la population soit déjà immunisée. Cela se verrait dans les données de surveillance syndromique que produisent les médecins de ville. »

La semaine dernière, 44.000 personnes ont consulté leur généraliste pour une suspicion de Covid-19, alors que 40.000 cas ont été confirmés par un test PCR depuis le début. Il semble encore loin le temps de « l’immunité collective », qui s’ouvrira lorsque 50 à 70 % de la population auront développé des anticorps après une guérison ou une vaccination.

(Source : le journal Les Echos – Solveig Godeluck – 1er avril 2020)

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