Selon de nombreuses études, une série de barrières décourageraient les femmes d’entreprendre. Toutes les femmes ? Non…car les jeunes femmes de la génération Y auraient une tendance à balayer d’un revers de main les blocages d’un autre temps. C’est plutôt une bonne nouvelle !

Au fait, c’est quoi être entrepreneur (se) ?

Diriger une PME familiale de 1.500 personnes, diriger son cabinet de conseil, être sa propre et seule employée n’est en effet pas la même chose. Difficile débat.

Il existe plusieurs définitions, chaque pays ayant la sienne. Le consensus pourrait se faire autour des notions de « prise de risques » et de « produits innovants ». On observe en effet que de la start-up au grand groupe, tous genres confondus, des milliers d’individus créent chaque jour des entreprises en développant des produits innovants.

Ces aventures entrepreneuriales résultent chaque fois de la naissance d’un projet et d’une prise de risque. Malheureusement, les femmes ne sont que faiblement représentées.

Et pourtant…

Les femmes sont sensiblement plus nombreuses que les hommes puisqu’elles représentent 52 % de l’ensemble de la population européenne (Wegate.eu). En 2012, dans l’Europe des 28, 34,4 % d’entre elles étaient des indépendantes et 30 % des créatrices de jeunes entreprises.

Cinq pays enregistraient le plus haut taux d’entrepreneuriat féminin, parmi lesquels l’Albanie, la Grèce, le Portugal, l’Italie et la Croatie. L’Allemagne, la France, à certains égards, le Royaume-Uni, la Belgique, le Luxembourg affichent de leur côté un taux d’entrepreneuriat féminin plutôt faible.

Les freins à la création d’entreprise sont-ils réels ?

Selon les nombreuses études européennes menées sur le sujet, le challenge pour les femmes serait d’accéder aux financements, à l’information, à la formation, aux réseaux professionnels et de concilier vie de famille et business.

L’argent et la prise de risques en particulier, deux aspects majeurs de la création d’entreprise, constitueraient chez les entrepreneuses le frein le plus important. S’agissant de l’argent, les femmes et leurs représentantes pointent du doigt les attitudes négatives des institutions financières à leur égard, qui leur offriraient des conditions de prêts différentes en comparaison des offres faites aux hommes. Ce à quoi certains ne manquent pas d’objecter que la petite taille des entreprises féminines en est probablement la véritable raison, les banques ne les finançant pas de toute manière ainsi que les secteurs dans lesquels elles interviennent (habillement, restauration…).

Il faut bien admettre que les finances, les sciences et les technologies, les transports ou l’immobilier restent encore des secteurs qu’elles n’investissent pas ; bien que l’on y ait observé ces derniers temps une montée des créatrices.

D’autres travaux menés en Europe sur le rapport des femmes à l’argent (Professional Women Network, Women&Money, 2013) montrent un rapport problématique au financement.

Les femmes dirigeantes par exemple s’engageraient peu à remettre en cause leurs rémunérations et, lorsqu’elles sont créatrices d’entreprises, leur mise de fonds serait aussi plus modeste que celles des hommes.

Le défaut de formation économique, scientifique, technologique, l’absence de réseautage professionnel à haut niveau, à la différence de leurs homologues masculins, leur répugnance à faire appel à un business angel trop peu souvent féminin ou à un fonds d’investissement, les handicapent lourdement.

Investir moins dans le développement de leur entreprise, emprunter a minima, hésiter à ouvrir le capital révèlent aussi une aversion au risque.

La création d’entreprise, une stratégie alternative ?

Force est de constater que la volonté d’épanouissement personnel semble plus forte que le goût d’innover. Et aussi, se sortir du chômage, rebondir afin d’échapper au « plafond de verre », articuler vie professionnelle, familiale et sociale, gagner en autonomie… Les motivations des femmes créatrices sont le plus souvent éloignées du goût du pouvoir, du souci de réussir.

Fort heureusement, il semblerait que, depuis quelque temps, les femmes créent de moins en moins par défaut. Une nouvelle génération de femmes mieux formée, maîtrisant les nouvelles technologies, utilisant les financements alternatifs et le réseautage bouscule les anciens codes, les institutions (familiales, économiques, sociales).

Les jeunes start-uppeuses révolutionnent le travail

L’une des caractéristiques des 24-35 ans est de porter d’autres fondamentaux que nos modèles actuels. La pratique du partage est vue comme une nécessité pour continuer d’accéder à un bien-être à moindre coût, crise économique oblige.

Déterminées là où leurs aînés étaient émotionnelles, elles sont capables de convaincre une communauté du bien-fondé de leur(s) projet(s). Elles ont un sens inné du collectif, n’hésitant pas par exemple à échanger des compétences croisées sur le mode « tu m’aides à développer mon objet connecté, je t’aide pour ta communication Web » ; elles résautent professionnellement, à haut niveau, si cela est nécessaire ; elles n’hésitent pas à s’associer avec des hommes de leur âge, évitant ainsi l’isolement et surtout, acceptent la prise de risques.

Elles ont en prime un bon, voire un très bon niveau de formation. Cette génération (Y) de créatrices de micro-entreprises recyclent, inventent en bousculant les codes, humanisent les relations.

Côte argent, elles s’inscrivent volontiers dans l’économie circulaire. Elles savent aussi aller chercher des fonds auprès des incubateurs, des investisseurs, institutionnels ou non. L’entrepreneuriat est ainsi vécu comme l’école de la débrouille. Une étude de Women Initiative Foundation montre, qu’en France, cette génération monte et les filles sont fondatrices à 40 %.

Pour autant, tout n’est pas idyllique. Elles sont souvent obligées de se suradapter pour trouver des financements, parfois à refuser de le faire, mettant en péril le développement de leurs projets. Tandis qu’autour d’elles, la bulle start-up se développe à coups de millions de levées de fonds. Quoi qu’il en soit, elles osent, vont de l’avant et créent une société plus collaborative, plus interactive. On compte sur elles !

Martine Borderies

(Article publié dans le numéro 91 d’Entreprises Magazine, Septembre/Octobre 2018.)

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