Les litiges auprès des juridictions civiles en 2019 au Luxembourg se chiffrent à plus de 5 000. Le rapport du ministère de la Justice ne fait cependant pas la distinction entre les litiges consommateurs-entreprises et les litiges entre les consommateurs ou entre les entreprises.

Le nouveau projet de loi, déposé récemment au parlement, a pour objet l’introduction d’un mécanisme de recours collectif en droit de la consommation luxembourgeois.  De quoi parle-t-on ? Pourquoi fait-elle autant parler d’elle ?

Le recours collectif, comment pourrait-on le définir simplement ? C’est assez simple. Des consommateurs lésés pourront donc se rassembler, lors d’un litige avec un commerçant ou encore une structure. Ils pourront intenter une action en justice contre un professionnel afin de faire reconnaître sa responsabilité pour non respect d’une loi et obtenir un jugement de responsabilité qui pourra le condamner.

Ca ne passe pas auprès des chambres professionnelles

Ce nouvel « outil » juridique ne fait, cependant, pas l’unanimité notamment auprès de la Chambre de Commerce et la Chambre des Métiers : « Nous ne nous opposons pas à cette idée qui va dans le sens de la protection du consommateur. En revanche, ce projet de loi est trop large et peut complexifier inutilement les futures procédures découlant de la mise en application de la nouvelle loi » explique Tom Wirion, directeur général à la Chambre des Métiers du Grand-Duché.

Un exemple pour bien comprendre

Cette loi n’existait pas au Luxembourg. En comparaison, les recours collectifs sont désormais possibles en France depuis octobre 2014. Désormais, un consommateur désabusé pourra rassembler, sous une même procédure, l’ensemble des consommateurs qui auront rencontré le même souci.

“Le diable se cache dans les détails”

Dans la théorie, Tom Wirion, directeur général à la Chambre des Métiers ne voit pas de problème. Sauf que la loi prévue manque « cruellement » de précisions notamment sur la liste des litiges sur le plan matériel : « la loi ne limite pas les demandes à certains types de dommages, mais entend au contraire couvrir tous les types de dommages individuels réparables. On ne peut pas fonctionner ainsi. Nous réclamons une liste précise des dégâts matériels concernés » demande-t-il.

Pire, la nouvelle réglementation intègre des dommages moraux et corporels : « Il faut donc définir les dommages causés par chacun des plaignants. Les affaires pour un tribunal risquent d’être longues à traiter et les dossiers vont traîner dans les couloirs d’un palais. Une loi doit alléger les procédures et non les rendre plus complexes ».

Recourir contre son plein grès : c’est trop !

Autre sujet qui coince, le consentement des clients lors du recours collectif. Une note, prévue dans la loi, que le directeur général, ancien avocat, ne comprend décidément pas. En effet, la loi prévoit un système de l’« Opt out » qui permet de «  garantir qu’aucun justiciable ne soit engagé contre sa volonté ou sans le savoir dans une action en justice ».

En somme, un consommateur désabusé pourrait “intégrer” contre son plein grès un collectif qui lance une procédure : « C’est une idée alambiquée » note Tom Wirion, « On fait un recours pour…un recours non consenti par une personne. Je crois que là, on marche un peu sur la tête ».

Les chambres plaident pour le « Opt in », c’est-à-dire « que l’adhésion d’une personne a un groupe de consommateurs se fasse en connaissance de cause » détaille-t-il. 

95% de PME au Luxembourg

En conséquence de ces nombreuses réserves, les chambres professionnelles : « suivront avec attention les développements relatifs à ce projet de loi susceptible d’impacter négativement un nombre important d’acteurs économiques luxembourgeois dans un contexte d’ores et déjà difficile ».

Tom Wirion, de la Chambre des Métiers rappelle que 95% des entreprises au Luxembourg sont des PME et que « ce rapport de force » en instaurant une loi jugée plutôt dure envers les commerçants ou d’autres professionnels pourrait se faire avant tout par la « médiation ».

La Chambre de Commerce et la Chambre des Métiers espèrent désormais : « que ce projet de loi soit revu et corrigé ». Rapidement.

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