Il aura fallu plus de quatre jours pour parvenir à un accord des chefs d’Etat et de gouvernement, mardi à 5h30, des 27 pays de l’union Européenne.

Un plan de relance européen « historique », de 750 milliards d’euros ! comme l’ont dit Angela Merkel et Emmanuel Macron. Des subventions octroyées aux pays les plus touchés par la crise du Covid-19, sur la base d’un emprunt commun aux 27. L’Europe bascule dans une nouvelle dimension, celle d’une certaine solidarité budgétaire : « Une étape majeure et essentielle a été franchie. C’est un changement historique de notre Europe et de notre zone euro », a martelé Emmanuel Macron à la fin des négociations.

Cinq pays réticents ou radins ?

Très réticents à l’idée de subventions, les quatre pays du Nord autoproclamés « frugaux » (Pays Bas, Suède, Danemark et Autriche), rejoints par la Finlande, ont très durement négocié leur accord. Au final, la part des subventions dans le plan est ainsi ramenée de 500 milliards à 390 milliards d’euros, le reste étant constitué de prêts plus classiques aux Etats, à hauteur donc de 360 milliards, qui seront à rembourser par chacun des pays demandeurs.

L’Europe du Sud a dû céder après avoir longtemps fait de 400 milliards un minimum.  Au final, la France devrait toucher de 35 à 40 milliards d’euros de subventions, comme escompté. L’Italie et l’Espagne, futurs principaux bénéficiaires, toucheraient quelque 60 milliards d’euros.

Droit de regard

Emmenés par le premier ministre néerlandais Mark Rutte, les frugaux ont aussi obtenu une sorte de droit de regard sur l’utilisation des subventions par les pays bénéficiaires. C’est un point qui a longtemps bloqué l’Espagne et l’Italie, inquiètes de ne pas se voir mises sous tutelle comme la Grèce lors de la crise de l’euro.

Mark Rutte, dont la ligne dure visait aussi à répondre à la pression exercée par la droite nationaliste et l’opinion néerlandaises, qui jugent l’Europe du sud trop dispendieuse, n’a pas obtenu le droit de veto qu’il réclamait, via une validation des plans nationaux de relance à l’unanimité des 27. Mais le dispositif final adopté, complexe et tortueux comme Bruxelles sait faire, prévoit bien une forme de contrôle des plans nationaux de relance par le Conseil, à la majorité qualifiée.

De forts rabais pour les frugaux

Le plan de relance, initié par le couple franco-allemand, n’est pas sans conséquences pour le budget 2021-2027 de l’Union.

D’une part, les frugaux ont obtenu une diminution de leurs contributions européennes annuelles. Ainsi, les Pays Bas vont baisser leur facture européenne annuelle de deux milliards d’euros. L’accord a été difficile à accepter pour la majorité des Etats membres qui voulaient profiter du départ du Royaume-Uni, leur initiateur, pour mettre fin à ces dispositifs. Et en particulier la France, qui paie une partie de ces rabais. Ce n’est pas le cas de l’Allemagne, qui, elle, en bénéficie et voit son rabais maintenu à son niveau actuel.

Le plan de relance  provoque la baisse de certaines subventions

Le président du Conseil européen, Charles Michel, propose un cadre financier 2021-2027, hors plan de relance, de 1.074 milliards d’euros, soit 26 milliards de moins que la proposition de la Commission européenne de mai.

Certaines subventions seront revues à la baisse dans le domaine de la santé ou le programme Erasmus, ou encore le fonds de Défense qui sera de 7 milliards au lieu de 13 initialement prévus en 2018.

La proposition de Charles Michel maintient ainsi les dépenses classiques juste au-dessus de 1 % du revenu national brut de l’Union.

Au final, le prochain cadre financier pluriannuel  sera  de 1.070 milliards d’euros, contre 1.100 proposés par la Commission européenne et 1.300 demandés par le Parlement européen.

Angela Merkel a toutefois affiché « pas de regrets » et souligné que « ces concessions font partie de l’esprit de compromis, même si ce dernier a été douloureux. » ​Emmanuel Macron a aussi défendu « des concessions proportionnées et nécessaires pour avoir l’essentiel, un plan de relance ambitieux. » « Aujourd’hui, avec le plan de relance, le budget européen est quasi doublé et désormais proche de 2 % du revenu national brut », a insisté le chef d’Etat français, pointant que « la Politique agricole commune est stabilisée, la politique de cohésion est maintenue et toutes les politiques d’avenir voient leur budget augmenter. »

Etat de droit et budget pour le climat, mais pas seulement….

« Pour la première fois dans l’histoire européenne, le budget est lié aux objectifs climatiques et le respect de l’Etat de droit devient une condition pour l’octroi des fonds », s’est de son côté félicité Charles Michel.

L’accord prévoit que 30 % des dépenses, du budget comme du plan de relance, devront aller directement à la lutte contre le réchauffement climatique. Il est donc question, de mener à bien la transition écologique, mais aussi digitale, sanitaire, automobile, aéronautique etc.

Comment sera financé cet emprunt européen ?

Ce matin, Thierry Breton sur France info a expliqué : “Pour la 1ère fois, l’Europe emprunte pour l’Europe et les Européens.
Et pour financer cet emprunt historique, pas d’impôt pour nos concitoyens Européens. C’est bien aux frontières de notre marché intérieur que l’on mettra des taxes.

Maintenant l’accord doit être approuvé dans chaque pays membre et ensuite ratifié par le parlement européen.

Enfin, on pourra noter que l’accord a été conclu, le 21 juillet, jour de la fête nationale belge.