Le 2 avril 2020, la Cour de justice de l’Union européenne s’était prononcée en faveur des parents lésés par la suppression de leurs allocations familiales, sous prétexte que les enfants non biologiques du travailleur frontalier, n’avait plus droit aux allocations familiales.

La Cour de Justice de l’Union Européenne avait ainsi décidé et jugé :

« la  règle d’égalité de traitement s’oppose à des dispositions d’un État membre en vertu desquelles les travailleurs non-résidents ne peuvent percevoir une allocation, telle que l’allocation familiale demandée par FV, que pour leurs propres enfants, à l’exclusion de ceux de leur conjoint avec lesquels ils n’ont pas de lien de filiation, mais dont ils pourvoient à l’entretien, alors que tous les enfants résidant dans cet État membre ont le droit de percevoir cette allocation. »

La loi devait être modifiée mais on attend encore…

Victoire pour les enfants non biologiques des travailleurs frontaliers

Ce matin, Maître Pascal Peuvrel, avocat à la Cour au Luxembourg, qui se bat depuis 2016 pour que tous les enfants aient les mêmes droits, nous annonce en exclusivité la victoire face à la caisse de l’avenir des enfants.

Le Conseil arbitral de la Sécurité Sociale a donné raison aux parents plaignants à qui on a vu refuser les allocations familiales depuis le 1er août 2016, pour leurs enfants

Tous les frontaliers lésés doivent réclamer

Maître Peuvrel, contacté ce matin, nous confie : « J’appelle tous les frontaliers lésés à introduire une demande en paiement des allocations familiales dont ils ont été privés depuis  2016 ».

Maître Pascal Peuvrel, avocat à la Cour

mail : [email protected] , Téléphone + 352 26 20 22 62


Voici les détails du jugement

La demande en obtention des allocations familiales a été introduite en date du 04 janvier 2016 de sorte qu’il y a lieu appliquer l’article 269 du Code de la sécurité sociale dans sa teneur applicable au moment de l’introduction de la demande.

En effet, la loi du 23 juillet 2016 portant modification du Code de la sécurité sociale; de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, et abrogeant la loi modifiée du 21 décembre 2007 concernant le boni pour enfant n’est entrée en vigueur que le premier jour du mois qui suit sa publication au Mémorial, à savoir le 1er août 2016 et ne saurait rétroactivement s’appliquer à des périodes antérieures à son entrée en vigueur conformément à l’article 2 du Code civil qui dispose que:« La loi ne dispose que pour l’avenir; elle n’a point d’effet rétroactif».

L’article IV de la loi précitée, en son dernier alinéa, dispose qu’ «En cas d’interruption du droit à l’allocation familiale après l’entrée en vigueur de la présente loi, l’enfant à nouveau bénéficiaire sera soumis aux conditions des dispositions de la présente loi et touchera le montant de l’allocation familiale prévu à l’article 272 ci-dessus, sans prise en compte du montant éventuellement touché par ce même enfant avant l’entrée en vigueur. »

A défaut de changement factuel dans la situation des requérants ou d’interruption du droit à l’allocation familiale, l’ancienne législation demeure applicable.

Ceci a d’ailleurs été récemment confirmé le Conseil supérieur de la sécurité sociale dans un arrêt du 20 mai 2021 (n° du reg. ALFA 2021/0049, n°2021/0151) suivant lequel« en vertu du principe de non-rétroactivité des lois prévu à l’article 2 du code civil, la loi applicable est celle en vigueur à la date de la demande et de l’octroi des droits à l’intimée puisque c’est à cette date que les rapports juridiques se sont créés entre parties. C’est dès lors cette loi qui régit les rapports entre parties et les droits acquis sous cette loi ne sauraient être remis en cause par une loi postérieure ». L’article 269, alinéa 1er du Code de la sécurité sociale, dans sa teneur applicable avant la loi du 23 juillet 2016, disposait que« A droit aux allocations familiales dans les conditions prévues par le présent chapitre,

a) pour lui-même, tout enfant résidant effectivement et d’une façon continue au Luxembourg et y ayant son domicile légal;

b) pour les membres de sa famille, conformément à l’instrument international applicable, toute personne soumise à la législation luxembourgeoise et relevant du champ d’application des règlements communautaires ou d’un autre instrument bi- ou multilatéral conclu par le Luxembourg en matière de sécurité sociale et prévoyant le paiement des allocations familiales suivant la législation du pays d’emploi. Est considéré comme membre de la famille d’une personne l’enfant appartenant au groupe familial de cette personne, tel que défini à l’article 270. Les membres de la famille visés par le présent texte doivent résider dans un pays visé par les règlements ou instruments en question.

La condition suivant laquelle l’enfant doit avoir son domicile légal au Luxembourg est présumée remplie dans le chef de l’enfant mineur lorsque la personne

–  auprès de laquelle l’enfant a son domicile légal conformément à l’article 108 du Code civil, ou bien

–  dans le ménage de laquelle l’enfant est élevé et au groupe familial de laquelle il appartient en application de l’article 270, a elle-même son domicile légal au Luxembourg conformément à l’alinéa 3. (. . .) ».

L’alinéa 5 de cet article dans sa teneur applicable avant la loi du 23 juillet 2016, disposait que « Par dérogation à l’alinéa 1, les personnes soumises à la législation luxembourgeoise ont droit, pour les enfants résidant à l’étranger qui ont la qualité de membres de leur famille, aux allocations familiales conformément aux dispositions afférentes des règlements communautaires ou d’autres instruments internationaux conclus par le Luxembourg en matière de sécurité sociale. »

L’ancien article 270 du Code de la sécurité sociale:« Le montant del ‘allocation prévue à l’article 2 7 2, alinéa 1 est déterminé en fonction du groupe familial auquel appartient l’enfant bénéficiaire.

Sont considérés comme appartenant à un même groupe familial, pour autant qu’ils remplissent les conditions d’octroi des allocations familiales, tous les enfants légitimes ou légitimés issus des mêmes conjoints, ainsi que tous les enfants adoptés par les mêmes conjoints en vertu d’une adoption plénière.

Sont assimilés aux enfants légitimes d’une personne, aussi longtemps qu’ils sont légalement déclarés et élevés dans son ménage et qu’ils remplissent les conditions visées à l’alinéa précédent

a) les enfants adoptés en vertu d’une adoption simple;

b) ses enfants naturels qu’elle a reconnus;

c) les enfants du conjoint ou du partenaire au sens del ‘article 2 de la loi du 9 juillet 2004 relative aux effets légaux de certains partenariats;

d) ses petits-enfants, lorsqu’ils sont orphelins ou que les parents ou celui d’entre eux qui en a la garde effective sont incapables au sens de la loi (. .. ). » Le retrait du bénéfice des allocations familiales par la CAE avait été opéré uniquement par le fait de l’entrée en vigueur de la loi du 23 juillet 2016 précitée sans autre changement dans la situation de fait des requérants.

Le jugement est clair

En conséquence, et suivant les enseignements à retenir de l’arrêt du Conseil supérieur de la sécurité sociale du 20 mai 2021 précité, la Caisse pour l’avenir des enfants ne saurait se contenter de la seule circonstance que les enfants des prestations desquels il s’agit, ne sont ni les enfants légitimes, légitimés ou naturels de Madame X, ni ses enfants adoptifs, en vue de priver cette dernière, affiliée à la législation luxembourgeoise au 1er août 2016, de son droit à se voir attribuer les allocations familiales de source luxembourgeoise.

En effet, aucun changement de faits n’a été réalisé au 1er août 2016 de sorte qu’aucun argument valable ne saurait être invoqué par la CAE pour procéder au retrait du bénéfice des allocations familiales dans la mesure où les anciennes dispositions demeurent applicables en l’espèce.

Dans ces circonstances, le recours est à déclarer fondé en ce qu’il tend à voir réformer la décision entreprise laquelle porte suppression des allocations familiales au  1 août 2016, tout comme sa motivation sous­-jacente.

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