C’est une nouvelle qui, en apparence, pourrait paraître anodine mais qui, dans les douze prochains mois, pourrait avoir une réelle incidence sur le système de santé de la Province de Luxembourg.

En début de semaine, le cabinet du ministre des Finances belge, Vincent Van Peteghem, confirmait aux députés wallons Benoit Piedboeuf et Josy Arens le report de l’application de la nouvelle convention belgo-française, censée, entre autres, réglementer l’imposition des travailleurs frontaliers.

Conséquence : ladite convention ne pourra pas être « opérationnelle » au 1er janvier de l’an prochain, mais plutôt à partir du 1er janvier 2024 seulement.

Ce que prévoit la convention

Après une première convention signée en 1964, les gouvernements des deux États voisins ont estimé qu’il était temps d’actualiser les textes jusque-là en vigueur afin, entre autres, d’éviter les abus. Sauf qu’une clause en particulier pose problème et a entraîné une levée de boucliers dans le secteur public, notamment hospitalier.

Cette clause stipule clairement qu’à compter de la date d’application de la nouvelle convention, les frontaliers français travaillant en Belgique dans le secteur public seront désormais imposés en Belgique, et non plus dans leur pays de résidence.

Un changement d’imposition qui ne serait pas sans conséquence puisque les salariés en question pourraient perdre une grande partie de leurs revenus (jusqu’à 40 % par exemple pour les infirmiers travaillant en Wallonie), la faute à un taux d’imposition plus sévère au Plat Pays que dans l’Hexagone.

Pourquoi ça coince ?

Contrairement aux salariés du secteur privé qui, pour celles et ceux bénéficiant de l’ancien système, ont le droit grâce à un moratoire de continuer à être imposés dans leur pays de résidence jusqu’en 2033, la situation sera donc complètement différente pour les personnels travaillant dans le public.

Chez Vivalia, l’intercommunale de soins de santé belge responsable de la gestion des services hospitaliers dans toute la Province de Luxembourg, on prend la situation très au sérieux. En 2017, la société gérait près de 1 500 lits et employait plus de 3 700 personnes dont au moins 300 infirmiers français.

Interrogé par nos confrères belges de DH Net, le directeur de Vivalia reconnaissait que si un moratoire similaire à celui appliqué pour les salariés du privé n’était pas prochainement mis en place pour ceux du secteur public, « la situation deviendrait très dangereuse pour nos hôpitaux ».

La tentation du voisinage

À Arlon, Virton, Bastogne… les établissements de la province frontalière du Luxembourg sont en effet déjà en sous-effectifs ; la faute principalement à des départs en pagaille depuis la période Covid.

Début octobre, il manquait ainsi quelque 180 infirmiers dans les établissements gérés par Vivalia. À titre indicatif, notons que 30 % du personnel médical de l’hôpital d’Arlon sont des ressortissants français.

Le danger est donc bien réel et pourrait s’aggraver dès début 2023, bien avant l’application concrète de la convention. La faute au tropisme des voisins lorrains et luxembourgeois.

La Région Grand Est, vient de proposer une prime pouvant monter jusqu’à 16 000 euros pour les futurs infirmiers, percevable à la condition de rester au moins quatre années une fois leurs études achevées dans ladite région.

Le Grand-Duché peut, lui, s’appuyer sur une rémunération plus importante de ses personnels de santé ; un infirmier au Luxembourg pouvant toucher environ 3 000 euros en début de carrière avec entre 100 et 150€ supplémentaires à chaque nouvel échelon.

À défaut d’un aménagement législatif permettant une exception pour certains frontaliers français travaillant dans le public, tout porte à croire qu’un exode massif de ces derniers hors de la Belgique pourrait avoir lieu. Les prochains mois seront décisifs.

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