A défaut d’applaudir à tout rompre, c’est tout de même un ouf de soulagement que le patronat luxembourgeois a expiré à l’issue des législatives du 8 octobre. Un tandem Chrétiens-sociaux (CSV)/Libéraux (DP) n’étant pas pour lui déplaire. En tous cas, voilà une «  coalition consciente des défis » bien plus dans la tonalité de l’Union des entreprises que ne l’aurait été une majorité socialiste (LSAP) réclamant, par exemple, une diminution du temps de travail

Il est vrai qu’avec Luc Frieden en guise de Premier ministre potentiel et désigné comme formateur du futur gouvernement, le patronat retrouve une figure connue (et appréciée). Non seulement en raison de son passé de ministre des Finances (1998-2003) mais aussi car c’est à lui qu’est revenue la présidence de la Chambre de commerce ces quatre dernières années. Mais comme les autres partenaires sociaux invités, lundi, à exposer leur point de vue sur le Luxembourg de demain, le patronat s’est volontiers plié à la présentation de ces desideratas.

Des propositions, l’Union des entreprises (UEL) n’en manque pas. Elle en avait même un plein carton à présenter, ce 16 octobre, aux syndicats et représentants politiques réunis pour dialoguer. « Comme les ministres seront certainement désignés juste avant la saint Nicolas ou Noël, autant demander des cadeaux, non ? », plaisantait Jean-Paul Olinger à l’heure de distribuer le dossier présentant les points à aborder selon le patronat pour la mandature 2023-28.

Cinq pistes à creuser

1/ EMPLOI .-  Flexibilisation et organisation du travail, voilà deux chantiers sur lesquels souhaite avancer le patronat. « Il faut arriver à changer le cadre légal pour donner à chaque entreprise la possibilité de voir, en fonction de sa charge de travail, quel effectif elle doit mobiliser. »

De plus, l’UEL (et ses partenaires de les industriels de la Fédil ou de la Chambre du commerce) souhaite qu’une réflexion soit entamée sur la formation continue. « Le système fonctionne mais il est perfectible. Notamment en apportant les motivations pour les personnels à se perfectionner, en réfléchissant aux manières d’organiser le travail quand un salarié est justement en formation. Il faut aussi se pencher sur l’offre pour qu’elle soit bien mieux adapter aux besoins des salariés comme des sociétés. »

Par ailleurs, le patronat entend que soit révisé (et amélioré) le statut des travailleurs indépendants.

2/ FISCALITÉ .- Jouer sur l’impôt des entreprises ou des particuliers, c’est jouer sur la compétitivité du pays et son attractivité, voilà le message passé. Alors, baissez la fiscalité luxembourgeoises ! Il en va des marges des sociétés, du pouvoir d’achat des ménages mais aussi de la possibilité pour les recruteurs d’attirer les talents au Grand-Duché, chose de plus en plus délicate. 

« En regardant les pays autour de nous ou avec lesquels nous sommes en compétition, on s’aperçoit qu’ils ont su mettre des régimes fiscaux spécifiques et attractifs nettement plus favorables aux nôtres pour les métiers en tension, insiste Jean-Paul Olinger. Pour certains professionnels, ce peut être le plus qui décide d’une mutation ici ou là (je pense aux Fonds d’investissement par exemple, tellement important pour le maintien de la Place financière luxembourgeoise au top.»

3/ TÉLÉTRAVAIL .-  Au deuxième trimestre 2023, le télétravail était une réalité pour 32 % des résidents employés au Luxembourg et certainement autant pour les frontaliers. Si, en interne, on a appris à fonctionner avec ce “distanciel”, reste encore à clarifier bien des points selon le patronat.

Pourquoi la France n’a toujours pas officiellement voté le passage à 34 jours de télétravail (elle ne l’a que décidé) ? Quelle part du travail doit être considéré comme télétravail ou pas (exemple belge)? Pourquoi ne pas établir une base de 2 jours en home-office par semaine pour l’ensemble des employés originaires de la Grande Région sans changement fiscal ou régime de protection sociale

4/ CONSTRUCTION .-  Attention, danger !  Les syndicats l’ont rappelé, le patronat a lui aussi sonné le tocsin aux oreilles de Luc Frieden, l’ex-Premier Xavier Bettel et leurs équipes. Les secteurs de l‘immobilier et construction souffrent et des mesures urgentes s’imposent. Sans reprendre l’idée d’une tripartite sur le sujet (idée émise par le LCGB), le patronat luxembourgeois veut que les prochains ministres décident de mesures rapides pour assurer une relance type électro-choc

« Cela passera pas moins de contraintes administratives, plus de facilités pour les investisseurs privés et un effort de la main publique pour construire plus.» Á l’image, sur ce dernier point, de ce que vient d’entreprendre l’État ou la Ville de Luxembourg.

5/ RETRAITE & SANTÉ .- Le système de pensions dans son mode actuel ne sera plus viable très longtemps. D’où un appel du pied patronal à le réformer. Et tant qu’à faire autant aussi mettre les mains dans le financement et le fonctionnement de l’Assurance-maladie qui, ces derniers temps, a multiplié les possibilités de congés supplémentaires. Une pause serait la bienvenue « d’autant que l’absentéisme pour raison de santé a beaucoup progressé lui aussi »…

Pour le patronat, le gouvernement doit s’interroger sur cet absentéisme croissant, et veiller à ce que la Sécurité sociale soit bien en mesure d’effectuer les contrôles pour éviter tout abus.

 

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