C’est une situation, certes, peu courante mais à laquelle de nombreux salariés ont cependant déjà assisté : après un déjeuner entre collègues beaucoup trop arrosé, l’un d’entre eux a manifestement présumé de sa résistance à l’alcool et ne parvient pas à cacher une altération claire de ses facultés une fois de retour à son poste. Mais que risque-t-il réellement ?

Ne pas confondre état d’ivresse et forte alcoolémie

C’est la principale nuance à retenir pour un employeur qui aurait à trancher dans pareille situation. En France, le site cadremploi.fr rapporte ainsi l’histoire d’un ouvrier en bâtiment, licencié pour avoir été testé positif à l’alcool sur son lieu de travail mais qui, après s’être pourvu en cassation, a fini par obtenir gain de cause en voyant son licenciement annulé.

La raison : dans sa lettre de licenciement, son employeur indiquait un taux d’alcool dans le sang « au-dessus à la normale ». Or, dans son arrêt, la Cour de cassation française rappelle qu’un taux au-dessus de la normale, contrairement à un état d’ivresse, « n’est pas un grief recevable pour justifier un licenciement pour faute grave ». D’où l’importance de choisir les justes mots.

Une responsabilité collective

Au préalable, rappelons qu’au Luxembourg, le code du travail (à travers l’article L.312-1) oblige l’employeur à « assurer la sécurité et la santé des travailleurs dans tous les aspects liés au travail ». Afin de parvenir à assumer ces responsabilités, ce dernier « est en droit d’interdire à ses travailleurs la consommation d’alcool sur le lieu de travail ».

Par ailleurs, au sein d’une entreprise, ce même code du travail stipule clairement qu’il incombe à chaque travailleur « de prendre soin, selon ses possibilités, de sa sécurité et de sa santé ainsi que de celle des autres personnes concernées du fait de ses actes ou de ses omissions au travail ».

En clair, un employé constatant l’état d’ébriété d’un de ses collègues a l’obligation de signaler ce comportement à sa hiérarchie. Chacun est donc responsable de son propre état mais se doit en outre d’être vigilant quant à l’état de ses collègues et des risques que cela peut entraîner.

À la juste appréciation des juges

En définitive, si la consommation d’alcool (sur le lieu de travail ou juste avant d’y revenir) reste bel et bien une faute du salarié, l’Association pour la santé au travail des secteurs tertiaire et financier (ASTF) rappelle néanmoins qu’au Grand-Duché, « la gravité de cette faute est appréciée par le juge d’après son pouvoir souverain ».

Deux cas de figure se présente alors au magistrat :

-« soit tolérer une consommation d’alcool si celle-ci constitue un fait isolé » ;

-« soit admettre la consommation d’alcool en faute grave si celle-ci s’accompagne d’un état d’ébriété, d’un comportement perturbateur, d’un préjudice pour l’employeur, d’une incapacité de travailler ou d’un travail mal effectué, d’un effet répétitif ».

Quant au licenciement en tant que tel, la justice luxembourgeoise peut tout à fait le refuser en se basant notamment sur trois critères également repris par l’ASTF :

-la consommation excessive d’alcool « reste un fait isolé » ;

-« le salarié accuse une ancienneté importante au sein de l’entreprise » ;

-« le salarié n’a jamais eu d’antécédents ni reçu d’avertissements pour des faits semblables ».

Bien évidemment, si le salarié alcoolisé sur son lieu de travail occupe un poste à risque ou s’il est amené à conduire un véhicule dans le cadre de ses missions (chauffeur professionnel…), cette consommation d’alcool sera bien qualifiée de faute grave.

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