« A 3100 euros brut/mois, le calcul est vite fait ! Je signe tout de suite ! ». Le 1er juillet dernier, Baptiste découvrait pour la première fois son bureau personnel dans une banque privée française, sise au centre de Luxembourg ville. Avec une attrayante carotte à la clé ! « Je suis agent administratif. Plus précisément, je suis chargé de régulariser les comptes de clients depuis la réforme bancaire ». Depuis la fin de l’année dernière, le Grand-duché s’est en effet, bon gré mal gré, astreint à la législation européenne visant à mettre fin au secret bancaire, dans la foulée de l’affaire LuxLeaks. C’est le cœur de la mission confiée à Baptiste pour une période en intérim de six mois renouvelable. « Je ne fais pas d’opérations extraordinaires, mon statut est plus ou moins identique à celui que j’avais en France et j’ai doublé mon salaire », se réjouit le mosellan de 25 ans.

Une activité valorisée

Début 2014, fraîchement diplômé d’un master marketing en innovation, il signait son premier contrat à durée déterminée dans une banque de détails en Moselle. Un an et demi plus tard, il ne fait pas partie des agents à replacer en priorité. «En France, les jeunes servent de bouche-trous, peste-t-il, on nous complimente sur la qualité de notre travail, on nous assure qu’on nous replacera. Des promesses en l’air ». S’en suit une période longue de trois mois au chômage, jalonnée d’entretiens d’embauche à la pelle. « Je me suis dit que quitte à travailler dans la finance, autant me tourner vers le Luxembourg ». Un détour par Adecco et une batterie de tests plus tard, l’affaire est pliée. « La différence lors des entretiens est qu’au Luxembourg, on nous met en situation tandis que chez nous, on a l’impression que les interlocuteurs cherchent à nous piéger ».
Plus encore que le système de recrutement, c’est la valorisation de son activité qui séduit le néo-frontalier. Des responsabilités accrues, des conditions de travail où la pression se fait moins ressentir sont autant de critères à faire valoir. « Ici, je ne dois pas solliciter l’avis de dix personnes pour faire un virement de dix euros », sourit-il.

L’emploi moins sécurisé

Comble du satisfecit, il jouit d’émoluments en adéquation avec ses diplômes, une indexation rendue possible par le salaire social minimum dît « qualifié », propre au Luxembourg et qui instaure un seuil minimum.
Seule ombre au tableau, une sécurisation de l’emploi moindre qu’en France. « Demain, mon patron peut me mettre à la porte sans explication. C’est le seul hic même s’il faut vraiment travailler à l’envers», contrebalance Baptiste. Quant à ceux qui fulminent contre les heures de trajet, il nuance. « Pour un salaire doublé, à mon âge, insiste-t-il, je fais sans hésiter 1h30 de transports quotidien. Après 30 ans de métier ou avec une famille, je comprends que cela puisse rebuter ». Il sera déjà temps d’y réfléchir !