Ceci n’est guère surprenant, alors que de nombreux droits y sont directement attachés : rémunérations, heures supplémentaires, primes, congés, etc.

L’ALEBA est très concerné par ce problème et défend ses membres, tant devant l’employeur, avec l’aide et le soutien de la délégation du personnel de l’entreprise, que dans de nombreuses procédures en justice, pour obliger l’employeur à se conformer à la loi.

Mais qu’est-ce qu’un « faux-cadre » ?

On parle de faux-cadre, lorsqu’un salarié a été embauché ou promu au sein d’une entreprise, sous le statut de cadre supérieur, statut qui l’exclut du champ d’application de la convention collective de travail de son secteur, sans pour autant remplir les conditions prévues par la loi en vigueur pour être considéré comme un cadre supérieur.

Notez qu’il n’existe au Grand-duché de Luxembourg que deux statuts : cadre supérieur et salarié. Evitez donc de confondre les statuts reconnus au Grand-duché de Luxembourg avec la classification des statuts des pays voisins, comme la France par exemple (qui reconnaît un troisième statut : le « cadre » ou encore « middle-management »).

A partir de quand suis-je un cadre supérieur ?

Le Code du travail luxembourgeois, en son article L.162-8, définit le cadre supérieur comme suit :

« […] Sont considérés comme cadres supérieurs au sens du présent titre, les salariés disposant

(1) d’un salaire nettement plus élevé que celui des salariés couverts par la convention collective ou barémisés par un autre biais, tenant compte du temps nécessaire à l’accomplissement des fonctions,
(2) si ce salaire est la contrepartie de l’exercice d’un véritable pouvoir de direction effectif ou dont la nature des tâches comporte une autorité bien définie,
(3) une large indépendance dans l’organisation du travail et
(4) une large liberté des horaires du travail et notamment l’absence de contraintes dans les horaires […] ».

Il est important de souligner que les critères sus mentionnés sont cumulatifs, c’est-à-dire que toutes les conditions énoncées ci-dessus doivent être remplies, pour être considéré comme un cadre supérieur au sens de la loi.

Si l’une d’elles manque, on n’est pas cadre supérieur au sens donné par la loi en vigueur, un point c’est tout.

Le critère de la rémunération

La loi n’apporte pas de réponse claire et non équivoque à ce sujet. La jurisprudence actuelle a dégagé un calcul tiré de deux cas, en comparant la rémunération annuelle la plus élevée pouvant être touchée par un salarié conventionné, avantages de la convention collective incluses, avec celle touchée par le salarié ayant introduit le recours devant le tribunal du travail :

  • Si celle-ci est inférieur à 10% : la condition de rémunération nettement supérieure n’est pas remplie et le salarié est partant à considérer comme un salarié conventionné et non comme un cadre supérieur.
  • Si celle-ci est supérieur à 20% : la condition de rémunération nettement supérieure est remplie et le salarié est susceptible d’être considéré comme cadre supérieur, si les autres critères légalement prévus sont remplis.

Dans le secteur bancaire, l’ALEBA estime que la rémunération globale annuelle d’un salarié-conventionné groupe VI seuil 2 en 2017 se trouve aux alentours de 100.000€. La rémunération nettement supérieure pour un cadre supérieur ne devrait en pratique et selon la jurisprudence pas être inférieure à 120.000€.

Le critère de véritable pouvoir de direction effectif ou dont la nature des tâches comporte une autorité bien définie

La fonction occupée par le salarié doit comporter des devoirs et obligations, qui ne sont pas donnés à un simple subordonné (ex. : pouvoir de supervision, nombre de personnes sous ses ordres, etc.).

Plus important encore, le salarié doit disposer de responsabilités plus importantes pour être considéré comme étant un véritable cadre supérieur (p.ex. : disposer d’un pouvoir de signature A, le pouvoir de signature B n’étant pas suffisant pour le présumer, selon la jurisprudence).

L’ALEBA estime qu’une entreprise ne peut disposer de plus 5-10% de cadres supérieurs.

Le critère de large indépendance dans l’organisation du travail

Le salarié accomplit ses missions pour atteindre un objectif, respectivement pour arriver à un résultat. Pour cela, il ne doit pas simplement exécuter des ordres venant de sa direction, mais doit pouvoir exercer son travail de manière indépendante.

Le critère de large liberté des horaires de travail / d’absence de contraintes dans les horaires

Le salarié cadre-supérieur preste plus d’heures de travail qu’un salarié-conventionné, pour accomplir ses tâches et ses missions (p.ex. : voyages à l’étranger, etc.). C’est en partie pour cela qu’il est mieux rémunéré. Un salarié qui est soumis à des horaires bien précis, respectivement qui pointe ses entrées et ses sorties, tel que prévu dans les horaires de travail imposés dans son contrat de travail ne peut donc être considéré comme étant cadre-supérieur.

Comment prévenir des abus ?

Le dialogue social entre la direction et la délégation, ensemble avec l’ALEBA, est la solution privilégiée pour régler, à terme, ce problème.

Conclusions :

La situation de faux-cadre est une plaie ouverte qui n’a pas été soignée, ni refermée, ayant aujourd’hui des répercussions qui dépassent le problème lié à la rémunération.

En effet, l’impact sur la santé (p.ex. : risque de burnout dû à la mauvaise gestion des horaires de travail) et sur la vie privée (ex. : trop d’astreinte, trop d’heures supplémentaires, temps de récupération pour permettre un équilibre entre la vie privée et professionnelle) sont très sérieux et les chiffres alarmants sur les risques psychosociaux liés à l’activité professionnelle le démontrent à suffisance.

Il est donc temps de soigner cette plaie et de la refermer convenablement pour empêcher d’autres risques collatéraux.

Si vous pensez vous trouver dans une telle situation, ou si voulez faire analyser votre contrat de travail, contactez le département juridique de l’ALEBA par email à l’adresse [email protected].

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