Kamal (24 ans), est ingénieur logiciel au Luxembourg. Originaire de la région de Pont-à-Mousson, il travaille depuis août dernier dans le sud du pays, pour une société de consultance en informatique spécialisée dans les nouvelles technologies.
C’est son premier emploi. Pour éviter les longs trajets, il a décidé de s’établir dans un village qui se trouve à peine à 10 kilomètres de son lieu de travail actuel (côté français).

Son premier ramadan au travail

Musulman pratiquant, il fait actuellement le ramadan. Le mois du jeûne a commencé le 27 mai dernier. Il prendra fin pour lui autour des 24-25 juin prochains.

De l’aube au coucher du soleil, il ne doit pas manger, boire, ou fumer. Le soir, il dîne donc après 21h30 et se lève avant 3h00 du matin, pour prendre son petit-déjeuner, avant de se recoucher pour quelques heures.

C’est la première fois qu’il fait le ramadan en travaillant à plein temps. Il avoue bien supporter et ne pas avoir de coup de pompe, de perte de concentration ou d’efficacité durant la journée : “Je fais le ramadan depuis environ 8 ans. Ce n’est pas un gros problème si on s’alimente bien et intelligemment”, indique-t-il.

Le matin je prends des céréales complètes avec du lait de soja, plus simple à digérer, et une salade de fruits. Le soir, c’est une soupe, des pâtes avec de la viande blanche, et des fruits”, détaille-t-il. “L’objectif c’est de prendre des repas équilibrés et complets, pour ne pas avoir de problèmes durant la journée”.

Collègues compréhensifs

Comment réagissent ses collègues ? “Ils sont assez compréhensifs. Au début, quand ils ont vu que je ne partais pas manger avec eux, ils ont été surpris, mais sans plus. Ils m’ont alors posé plein de questions, pour en connaître les raisons, sur ce que j’ai le droit de faire ou pas, sur ce que j’ai le droit de manger…. Mais ils n’étaient pas forcément choqués”, précise-t-il.

Idem de la part de l’employeur, qui avait rapidement noté que Kamal ne mangeait pas de porc, ni ne buvait d’alcool : “Les gens ont de plus en plus l’habitude de voir des amis et des proches pratiquer le ramadan. Cela devient assez banal”, remarque-t-il.

Considérant que la pratique de la religion est un choix personnel et relève de la sphère privée, il effectue ses prières en fin de journée. “Si dans les pays musulmans, les employeurs accordent des pauses pour la prière, je préfère m’adapter, me retrouver avec moi-même, et prier hors des heures de bureau”.

Dans ce contexte de radicalisme et d’attentats, comment les gens réagissent-ils autour de lui ? “La plupart des personnes qui me connaissent savent que je n’ai pas d’idées ni de paroles extrémistes. Malgré tout, je garde mes convictions pour moi, car elles ne concernent que moi, et éventuellement ma famille. Et je ne veux pas importuner autrui avec cela”, insiste-t-il.

“Optimiste pour l’avenir”

Natif d’un village qui compte un tiers d’électeurs du Front National, en tant que Musulman, il ne s’inquiète pas de la situation : “La situation n’est pas dramatique. Nous sommes habitués à ces scores électoraux. Ce qui est curieux pourtant, les gens ne sont pas racistes, on ne ressent pas de tensions dans le village, ni de criminalité”, note-t-il. “Aussi, je me demande toujours pourquoi les gens votent FN, alors qu’il ne se passe rien et qu’il y a aucune inquiétude à avoir en termes d’insécurité. D’ailleurs, je ne sais même pas qui vote FN, d’autant que personne ne l’affirme haut et fort”.

Sur cette question, il reste persuadé que les mentalités doivent évoluer et que voter FN n’est pas la solution qui fera disparaître les problèmes du pays. Aussi, il se dit optimiste pour l’avenir, car il pense qu’Emmanuel Macron pourrait être un bon président, s’il fait bouger les choses et si son parti obtient la majorité aux législatives.

Confiant dans le futur du pays, il l’est aussi pour son avenir professionnel et personnel, dans la Grande Région : “Le fait de travailler au Luxembourg, d’avoir un emploi stable, et un CDI de surcroît, d’avoir passé la période d’essai, c’est valorisant, pour un jeune en début de carrière comme moi”, reconnaît-il. “Maintenant, je souhaite vivement évoluer dans mon métier, acquérir plus de compétences et d’expérience et avoir plus de responsabilités. Si j’arrive à avoir une position et un salaire plus intéressants, je pense que je viendrai vivre au Grand-Duché”.

Pour le moment, il n’a pas encore eu l’occasion de visiter le pays. Sauf les villes d’Esch-sur-Alzette et de Luxembourg. Il compte cependant bien s’y mettre, après le mois de jeûne.

Voir aussi : Faire le Ramadan en entreprise, qu’est-ce que ça change ?