Elle vient à peine de percevoir sa première fiche de paie mais une question la taraude : « Si je devais revenir, comment ferais-je ? ». A cette interrogation rhétorique, Laetitia, fraîchement frontalière pour la deuxième fois de sa carrière répond sans détour : « C’est inenvisageable ».

Dans le cas de cette mère de famille, las de tirer le diable par la queue, l’alternative tombe comme une aubaine en fin d’année précédente. A la recherche d’un emploi par-delà la frontière, « dans n’importe quel domaine », elle répand la nouvelle parmi ses proches qui eux aussi activent leur réseau. C’est finalement par le billet d’un triple intermédiaire que l’offre lui parvient. « Même si je ne regardais pas exclusivement pour cela, j’y avais songé, commente Laetitia, le ton très enthousiaste. C’est un job très répandu ici dans les familles aisées ».

Un peu d’appréhension accompagne ses premiers pas, « c’est une famille luxembourgeoise et je ne parle pas deux langues », mais la tension retombe rapidement. « Alors qu’ils conversent en allemand ou en anglais, quand je suis là, c’est uniquement en français qu’ils communiquent ».

« Un contrat à temps plein, une chose rare en France »

Financièrement, la dame de compagnie est passée du simple au double, « de 1100 euros à 1900 plus les allocations familiales, chose qui n’existe pas en France lorsqu’on a qu’un seul enfant ». Ses émoluments d’hôtesse d’accueil et le complément du Pôle Emploi lui permettaient auparavant, et pendant trois ans, tout juste d’atteindre le SMIC, le salaire minimum français. Aujourd’hui, grâce à « vrai contrat à temps plein », Laetitia apprécie sa nouvelle stabilité, « chose de plus en plus rare en France. C’est souvent des 25h avec des heures supplémentaires si l’entreprise en a besoin ».

Autre avantage, différence majeure par rapport à l’activité hexagonale, la fréquentation d’une seule et unique personne. Laetitia s’était en effet renseignée préalablement et « c’est bien souvent une intervention dans plusieurs domiciles. Là, je me gare à 11h30 sur une place de parking payée par mes employeurs et je repars à 19h30 ». Vingt minutes de porte à porte entre les deux domiciles. « Il y a eu une fois un contrôle douanier mais sinon je suis tranquille », souligne l’intéressée, bien consciente de sa chance.

Si elle passe moins de temps avec sa jeune fille, elle compense en lui « faisant plaisir autrement. Avec mon nouveau salaire, je peux lui payer d’autres choses comme des cours par exemple ». Tout bien réfléchi, elle s’interroge à nouveau : « comment, lorsqu’on habite juste à côté, ne pas vouloir y aller ? ».