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Comment les riches menacent l'économie  

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NoPasaran
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Il y a 9 ans   

ANALYSE • Les riches sont dépensiers, paient des impôts, investissent dans les entreprises. Et pourtant, leur multiplication est un poison pour le bien commun. Réflexions économiques sur les inégalités.

L’initiative pour l’abolition des forfaits fiscaux serait-elle le signe d’une croissante «hostilité antiriches»? Que le grand argentier genevois Serge Dal Busco se rassure: l’accumulation de richesses individuelles n’a que rarement été ressentie comme aussi légitime au sein de la population. Même au pays de l’égalité, la cupidité prend le dessus: 76% des Français voyaient en 2012 la course à l’enrichissement comme une «bonne chose1». Un individualisme forcené qui dispose de sa caution morale: l’inégalité serait le meilleur moteur de la création de richesses. Celle-ci, par la main magique du marché et de l’Etat, entrant ensuite dans un cercle vertueux: la fortune profiterait à tous par «ruissellement»: impôts, consommation et investissement. En langage savant, on parle de trickle down economics, doctrine néolibérale qui a inspiré les contre-réformes des années 1980.

Or trois décennies de baisses d’impôts et de libéralisations ont suffi à démentir l’adage reaganien: l’argent des riches n’a pas fait le bonheur des pauvres. Pourquoi? Le Courrier a posé la question à quelques économistes qui ont su conserver leur sens critique.

INÉGALITÉS, SOURCE D’INSTABILITÉ«Enrichissez-vous!» De Guizot à Deng Xiaoping, l’invite traduit un même optimisme: la course à la richesse nous mènerait vers la société de l’opulence. A en croire Till van Treeck, professeur d’économie sociale à l’université de Duisburg-Essen et expert auprès de l’Organisation internationale du travail (OIT), l’accumulation effrénée semble au contraire nous avoir conduits au bord du gouffre. Pour l’économiste allemand, le creusement des inégalités sociales, ces trente dernières années, serait la cause première du krach de 2008 et de la crise qui a suivi.

En étudiant les courbes des revenus et celles de la consommation depuis les années 1980, Philippe Askenazy donne crédit à cette hypothèse. Le directeur de recherches au CNRS constate en effet un décrochage progressif: malgré des revenus à la baisse, les classes les plus modestes ont continué de dépenser, alors même que les plus riches avaient tendance à épargner une part croissante de leurs gains. «A partir d’un certain niveau de richesse, les liquidités sont naturellement thésaurisées. Ce n’est pas parce qu’on est dix fois plus riche qu’on va dépenser dix fois plus», résume M. van Treeck.

Entre ces deux extrêmes: des instruments financiers tels les subprimes ont transformé l’épargne des uns en prêts pour les autres. Avec de juteux bénéfices correspondant au fort risque de défaut.

L’endettement des ménages a été renforcé par ce que Till van Treeck nomme, avec une pointe d’ironie, le «trickle down consumption»: plus les riches sont en mesure de dépenser pour obtenir un bien ou un service, «plus la classe moyenne est sous pression et s’endette, car ce sont les riches qui fixent les standards sociaux» (lire aussi en page XX). Aux Etats-Unis, entre 1980 et l’éclatement de la bulle, les créances des ménages sont passées de 60% du revenu disponible à 140%. Le krach était devenu inévitable.

En revanche, dans les pays où «le crédit privé ne s’est pas substitué au revenu», c’est l’Etat social qui a tenté de réagir. Mais à son tour, il n’a pu le faire qu’en empruntant. Contrairement au mythe, l’enrichissement des plus riches a donc sapé l’assise fiscale des Etats, puisque ce sont «ceux qui savent le mieux échapper à l’impôt qui captent la plus grosse part des revenus», explique M. Askenazy. Plus que le montant des créances, poursuit-il, ce sont les «doutes des investisseurs quant à la durabilité des finances publiques dans ce contexte inégalitaire» qui a fini par provoquer la crise des dettes souveraines en Europe.

Au final, la viabilité de la croissance et la stabilité d’un système économique seraient proportionnelles au niveau d’égalité sociale, résume M. van Treeck, s’appuyant sur des travaux menés par deux économistes du... Fonds monétaire international2!

LE RUISSELLEMENT VERS... LE HAUTMais si les effets négatifs de l’inégalité sont de plus en plus admis, la polémique soulevée par les travaux des économistes critiques comme Thomas Piketty ou Till van Treeck vient des conclusions systémiques qu’ils en tirent. Sans partager la vision apocalyptique d’un Karl Marx, M. Piketty s’appuie notamment sur l’exploration du passé pour décrire un système capitaliste intrinsèquement créateur d’inégalités. «C’est une mécanique infernale: la concentration des richesses alimente le pouvoir de ce groupe social et donc sa capacité à augmenter encore sa part et ainsi de suite, posant la question de la stabilité globale du système», décrit son collègue Philippe Askenazy. Autrement dit, au lieu du ruissellement prédit par la théorie, on assiste plutôt à un pompage naturel en direction du haut de la pyramide.

CAPITAL SANS DÉBOUCHÉSLa formule d’Helmut Schmidt est restée célèbre: «Les profits d’aujourd’hui sont les investissements de demain et les emplois d’après-demain.» Avec quarante ans de recul, la sentence du futur chancelier social-démocrate allemand résonne étrangement à son compatriote Till van Treeck: «De nombreux économistes continuent de penser qu’il faut réduire les coûts de production pour inciter à l’investissement. C’est un diagnostic erroné: nous sommes devant une crise de débouchés.» La faiblesse actuelle de l’investissement en Allemagne, alors même que ses entreprises – comme les suisses – regorgent de liquidités, suffirait à démontrer la vacuité du raisonnement.

Pour provoquer l’investissement, il faut soit une décision politique, soit une perspective de rentabilisation. Or, ni l’un ni l’autre ne se profilent, juge l’économiste de l’université de Duisburg-Essen. A contre-courant des libéraux, qui encensent le modèle allemand et le présentent comme une locomotive pour l’Europe, il estime au contraire que les réformes Schröder (baisses fiscales et dérégulation du marché du travail) sont l’une des causes de la crise actuelle. Ayant asséché sa capacité interne à consommer, l’Allemagne a dû exporter massivement à bas coûts, menant ses concurrents européens vers la crise.

«Tous les pays ne peuvent pas exporter davantage qu’ils importent», résume simplement Sergio Rossi, qui dirige la chaire de macroéconomie et d’économie monétaire à l’université de Fribourg. «L’Europe ne souffre pas d’un manque de compétitivité face au reste du monde – elle est exportatrice nette – mais connait de trop grandes inégalités internes. En conséquence, la réponse devrait être plus de convergence, pas davantage de concurrence», analyse à son tour M. Askenazy, qui craint que l’Europe n’entre dans une spirale déflationniste.

SPÉCULER AU LIEU D’INVESTIRPour le Français, la concentration du capital en réalité favorise deux types de placements: soit patrimoniaux (à la recherche du risque zéro), soit extrêmement risqués (sur les marchés financiers à des taux usuriers). Pas l’investissement productif de long terme. «La plupart des entreprises, sauf peut-être les sociétés familiales, décident d’abord la rémunération du capital, avant de s’intéresser à celle du travail, confirme M. Rossi. Cela contribue à faire gonfler des bulles spéculatives dont l’éclatement porte atteinte à la stabilité financière et à la cohésion sociale.»

LE COÛT DU CAPITALEt lorsque le débouché existe mais que l’entreprise est sous-capitalisée, elle se heurte à une barrière de plus en plus infranchissable: le «coût du capital».

Beaucoup moins popularisé que le coût du travail, il grève pourtant de la même façon les comptes des entreprises. «Attention, il faut distinguer le capital immobilisé pour produire (amortissement) et le prix financier de ce capital, de même qu’il faut distinguer la rétribution légitime que peut exiger un prêteur, en termes de compensation du risque et d’organisation du [censored], et ce que l’on peut qualifier de ‘surcoût’, qui est de l’ordre de la rente», avertit Laurent Cordonnier.

Auteur d’un rapport pour le syndicat français CGT, le doyen de la faculté des sciences économiques et sociales de l’université de Lille 1 estime que ce «surcoût» sans rationalité économique représente entre 30% et 50% du coût des emprunts. Sergio Rossi a un autre étalon: «Le taux d’intérêt moyen versé aux propriétaires du capital, de manière générale, ne devrait pas dépasser le taux de croissance économique à long terme.»

Les deux experts se retrouvent pour dire que la financiarisation de l’économie, qui aurait dû, en théorie, faciliter la circulation du capital vers les entreprises et faire baisser les coûts par la concurrence, a conduit au phénomène inverse. Laurent Cordonnier parle même d’un doublement, voire d’un triplement, du «surcoût» depuis trente ans!

Selon Sergio Rossi, les entreprises sont victimes de financiers toujours plus puissants qui «exploitent cet avantage dans une optique de très court terme». «Les investisseurs institutionnels possèdent aujourd’hui 60% des actions dans le monde, ils ont pris le pouvoir sur les entreprises, sommées de réaliser des rendements extravagants», s’alarme M. Cordonnier. Celles-ci se montrent d’autant plus dociles que les financiers ont «mis en place des schémas de rémunération des hauts dirigeants (stock options, bonus) alignés sur les intérêts des actionnaires». Du coup, on n’entendra jamais un dirigeant de grande entreprise se plaindre du coût du capital, alors qu’il se répand contre les charges «insupportables» liées au travail.

Si le premier «a effectivement un impact moins direct sur la compétitivité», admet l’économiste de l’université Lille, «l’augmentation constante des dividendes versés en France a clairement entraîné la chute des investissements en recherche et développement» et «déprimé l’investissement productif». «Depuis les années 1980, la part des dividendes nets est passée de 3% de la valeur ajoutée des entreprises à 9% aujourd’hui.»

DÉFICIT DÉMOCRATIQUEPour Laurent Cordonnier, le problème est aussi politique. Le rendement maximal du capital peut-il être le seul critère de l’investissement? «L’exigence d’un taux de rendement de 15% n’est pas une façon efficace de juger de sa pertinence, car cela revient à éliminer tout ce qui rapporte entre 0% et 15%», explicite le Français. D’autant, poursuit Sergio Rossi, que ces folles exigences entraînent des coûts humains et sociaux qui seront ensuite supportés par la collectivité.

A l’épouvantail de la ploutocratie agité par M. Piketty, Philippe Askenazy ajoute le spectre d’une «dérive populiste» favorisée par le «déclassement social de la grande majorité» des citoyens. «En tant que Français, c’est aujourd’hui mon angoisse absolue», conclut-il.

 

 

http://www.lecourrier.ch/125410/comment_les_riches_menacent_l_economie


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Tsarko
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Il y a 9 ans   

TLTR

Sérieusement, tu veux pas nous faire des résumés avec un lien vers l'article original, plutot que de copier/coller à chaque fois?


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Actarus_77
1155 Messages

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Il y a 9 ans   

Il y a des choses vraies dans l'article (spéculation, optimisation fiscale des plus riches...) mais relis Schumpeter, le vrai moteur de la croissance économique est lié à l'innovation (hors la croissance en France bien trop porté sur la consommation et notamment la consommation à crédit par le biais des déficit publique depuis 40 ans).

Hors il n'y a trop peu d'innovation pour qu'infime la croissance globale soit suffisante au ruissellement général dans la société, et si les coût du capital est le même en France qu'ailleurs celui des prélèvement obligatoire est supérieure (d'ou la nécessité de faire la grande reforme discale pourtant promise par l'actuel président) ce qui décourage ou délocalise une partie conséquente des investisseurs. 

Enfin, l'innovation en occident depuis une 20 à 30 ans n'est que la résultante d'un effort préalable d'investissement dans les domaine hautement technologique, effort qui requière donc une main d'oeuvre qualifié (et forcement coûteuse mais malgré tout bénéficiaire car les secteurs innovants sont peu concurrentiels contrairement au secteur technologie maîtrisé par les pays à la main d'oeuvre peu élevé) ce qui exclu de fait de la dynamique économique qui se voudrait vertueuse les non qualifiés et explique très largement le chômage de masse.


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gargalex
2133 Messages

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Il y a 9 ans   

Salut Acta,

 Tu as p-ê raison concernant le moteur = innovation, un bon moteur c'est bien, mais j'aurais quand même nuancé un peu, voire beaucoup, en disant qu'un des moteurs c'est l'innovation, et que ce n'est pas le moteur principal.

 Et puis, surtout d'ailleurs, le réel problème, c'est que si t'as une pédale de frein, de bons freins, pleinement enfoncée, qui s'appele "corruption des décideurs", et avec ou sans innovation, on n'avance tjrs pas !  Car même sans parler de l'innovation, on n'a jamais autant produit et aussi efficacement que de nos jours, alors faut pas revenir culpabiliser "tout le monde" en disant que c'est à cause du manque d'innovation qu'on en est là, c'est prendre les gens pour des cons.

 Explique moi pourquoi tout est à la baisse sauf les richesses des gens/familles les plus riches au monde ?  Explique moi pourquoi ils augmentent leurs bénéfices d'un pourcentage à 2 chiffres tout les ans depuis plus d'une dizaine d'année ?  Ca te mets pas la puce à l'oreille ça, ou alors vite, plongeons la tête dans le sable pour éviter la question ?  Une redistribution des richesses équitables, c'est pas ça qui serait plus juste, non ?  Accompagnée bien entendu de lois contraignantes pour les multinationales qui alors paieraient ce qu'ils doivent vraiment payer d'impôts, suffit de regarder tout ces scandales d'optimisation fiscale des plus grands groupes au monde, ils paient cacahuettes malgré des chiffres astronomiques, tu trouves ça normal ?

Plus je te lis plus je me demande si tu n'es pas un de ces trolls payé par l'EU pour venir essayer de casser toute discussion qui aurait la bonne idée de remettre en question cette construction foireuse d'union qui est, les faits et décisions le prouve, plutôt un club de mafieux.

 

 


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Actarus_77
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Il y a 9 ans   

Bonjour Garlatex, merci pour ta réponse construite et non pour avoir fait des C/C de quelqu'un d'autre. 

Concernant les moteurs de la croissance effectivement l'investissement aboutissant à l'innovation n'est pas le seul, mais s'est la meilleurs car elle vise à obtenir un avantage compétitif ce qui fait gagner des parts de marché, fait exporter d'avantage les entreprisses et est donc durable. Si la croissance repose comme s'est le cas en France essentiellement sur la consommation (publique et privé), s'est la course à l'endettement comme nous l'avons connu et un jour au l'autre le robinet du crédit se tarit (risque de crédit pour les prêteurs, capacité d'emprunt non illimité pour les emprunteurs)...et la course à la redistribution des richesses par la dépenses publique, dépenses qui deviennent plus importantes que les recettes et qui conduit à redistribuer des richesses non encore créées et donc à les emprunter...

Sinon concernant les plus riches que veux tu que je te dises sinon que de te demander se que tu proposes concrètement pour mettre fin au phénomène : la mondialisation à permis la libre circulation des bien et des personnes ce qui permet au plus riches d'investir dans les zone les plus dynamiques économiquement et de fiscaliser leurs revenus ou plus values dans les zone les moins gourmandes fiscalement. Ce n'est pas moi qui en suis responsable, et je n'ai pas de baguette magique pour lutter contre donc je vis avec. Trouver cela normal ou non est une position morale, je me place sur la plan de l'action dans le champs des possibles, pas dans le champs des illusions que je laisse à ceux qui veulent refaire le monde. Oui notre monde est imparfait et ce n’est pas un nouveauté, mais il à le mérite de laisser une chance à beaucoup à condition qu'il s'en donne les moyens et à mes yeux s'est largement suffisant pour que je m'en accommode sans trop d’état d’âme.