L’un a piqué une colère avant l’été en apprenant que l’usine ne ferait pas partie du paysage grand-ducal. Les autres fulminent contre l’idée de la voir ternir le leur.

Le ministre de l’Economie luxembourgeois, Etienne Schneider ne cachait pas sa rancœur vis-à-vis des membres du gouvernement qui lui ont fait faux bond dans un dossier qu’il souhaitait boucler.

En mai dernier, l’entreprise Knauf Insulation a préféré la commune frontalière d’Illange plutôt que celles de Sanem ou Differdange au Luxembourg pour l’implantation de sa future usine de production de laine de roche.

Motif avancé par les deux villes récalcitrantes : « il aurait été un non-sens aussi bien du point de vue économique qu’environnemental d’installer un haut-fourneau polluant alimenté par du charbon dans une zone aussi densément peuplée. »

 

« L’industrie pollue mais elle crée de la richesse »

C’est donc sur 17 hectares de la Mégazonne d’Illange que sortira de terre l’unité de production de la société allemande. Un espace initialement aménagé pour le feu projet Terra Nova, qui devait voir débarquer des milliers d’investisseurs chinois.

Depuis l’annonce de la nouvelle, alors que les négociations perdurent depuis deux ans sans faire de bruit, le président du Conseil départemental, Patrick Weiten, qui soutient l’initiative, fait face à la grogne d’opposants toujours plus nombreux.

Ces derniers dénoncent un « enfumage » au sens propre comme au figuré : d’une part, une enquête publique trop courte (30 jours) pour un dossier de cette envergure ; de l’autre, des incidences à la fois sur l’environnement et sur la santé humaine.

M. Weiten avance lui l’argument de l’attractivité du territoire. « Certes, l’industrie pollue, mais elle crée de la richesse et de l’emploi. Vous préférez peut-être que cette usine ne se fasse pas et qu’on mette 100 personnes de plus sur l’autoroute pour aller travailler au Luxembourg ? S’il n’y a pas d’emplois, nos jeunes partiront », a-t-il ainsi rétorqué, d’après Le Républicain Lorrain, aux contestataires l’ayant interpellé lors d’une réunion publique à Illange la semaine dernière.

Un conseil d’agglomération au Val Marie de Thionville jeudi 20 septembre à 18h ainsi qu’un Conseil municipal lundi à 18h au Beffroi (Thionville) sur le sujet se tiendront en présence d’élus d’opposition.

123 emplois mais des conséquences sur l’environnement ?

Pour le collectif fondé à la hâte « Stop Knauf Illange », et les signataires d’une pétition en ligne (près de 1.900 signatures pour l’heure), les 123 emplois directs et les quelque 300 autres induits n’en valent pas la chandelle.

L’exploitation, dont le terrassement a déjà débuté au cours de l’été, sera située dans une zone dîte « PPA » (Plan Priorité Air) alors qu’elle rejettera dans l’air des substances comme de l’oxyde d’azote, de l’oxyde de soufre, de l’ammoniac, du fluorure d’hydrogène, du chlorure d’hydrogène ou encore du Phénol.

Par ailleurs, les citoyens s’inquiètent des conséquences sanitaires alors que des habitations, des équipements sportifs, des écoles, sont établis dans les communes environnantes.

De son côté, Knauf, qui assure jouer le jeu de la transparence, confirme que les taux d’émission entreront dans les clous des normes législatives, voire seront même inférieurs à celles-ci.

Etablissement d’un « jury de nez » préconisé

Début août, un rapport des Missions régionales d’autorité environnementale (MRAe) pointait quelques insuffisances au dossier. Parmi elles, « l’absence de précisions quant à l’origine et la quantification des produits nécessaires à la fabrication de la laine de roche, de justification du choix de l’emplacement du site et l’étude solutions alternatives à la route pour les approvisionnements de matières premières et les expéditions des produits finis ainsi que d’un bilan environnemental global du projet. »

L’étude préconise par ailleurs l’établissement d’un « jury de nez » afin d’échelonner la perception des odeurs dans les zones avoisinantes, une étude paysagère, un process nécessitant moins d’énergies fossiles (gaz naturel et coke) ainsi qu’un scénario précis en cas d’accident industriel.

84 camions par jour

La demande en laine de roche est en croissance constante. Pour rappel, ce matériau est utilisé à des fins d’isolation des bâtiments en vue d’une consommation d’énergie réduite, d’isolation acoustique et de résistance au feu.

D’après la MRAe, la production annuelle de l’unité illangeoise s’élèverait à 112.000 tonnes maximum, à raison de 14 tonnes par heure. 84 camions desserviraient le site quotidiennement via l’A31.

L’ambition affichée par les industriels est d’exporter le produit fini majoritairement à destination de l’Allemagne et du Benelux. Ils espèrent lancer le processus à la fin de l’année 2019.