Dans le journal Les échos, notre consœur Leïla de Comarmond a publié un article sur les conditions de télétravail pour les salariés français. Cette réflexion peut être menée plus largement aux frontaliers.

34 000 réponses en quinze jours. Au-delà de la crainte de perdre son emploi – exprimée par un tiers d’entre eux -, le succès de l’enquête qu’a lancée l’Union des ingénieurs, cadres et techniciens de la CGT en dit long sur le besoin des salariés de livrer leur ressenti sur la situation exceptionnelle qu’est le confinement.

Alors que les distances ont rendu plus complexe sa diffusion, elle permet de mesurer le bouleversement qu’ont vécu les salariés français, du privé comme du public. À titre de comparaison, 200 000 personnes avaient répondu il y a trois ans à l’enquête « Parlons travail » de la CFDT, largement diffusée par ses militants dans les entreprises pendant trois mois.

Il faut dire que du jour au lendemain, plus des trois quarts des salariés ont abandonné leur poste habituel de travail pour des raisons sanitaires, de chômage partiel ou pour passer en télétravail. Et que ceux qui sont restés ont vécu une situation très anxiogène.

Violence de la bascule dans le télétravail

L’enquête, réalisée par des chercheurs syndiqués à la CGT des directions de la recherche des ministères du Travail et de la Santé, souligne que 43 % des salariés restés sur site ont continué à travailler avec la crainte de contracter ou transmettre le Covid-19.

Seuls 21 % des répondants ont estimé que « les mesures de prévention mises en place sont totalement suffisantes pour les protéger ». L’enquête montre aussi la violence du mouvement de bascule dans le télétravail. Plus pour les employés et professions intermédiaires que pour les cadres, même si c’était aussi une nouveauté pour une majorité d’entre eux.

Les conditions de travail s’en sont ressenti, avec des bureaux organisés avec les moyens du bord.

Pour plus de 8 répondants sur 10, l’employeur n’a pas défini de plages horaires de travail précises, ni de droit à la déconnexion organisé. Pour plus de 80 % des parents d’enfants de moins de 16 ans (majoritairement des femmes), il n’y a pas eu de réduction du temps et de la charge de travail.

Et globalement, un tiers des enquêtés (40 % des cadres) a même noté sa hausse.

Le malaise des managers

La difficulté à maintenir un collectif de travail à distance est aussi pointée, avec un fort sentiment d’isolement : près de la moitié des télétravailleurs interrogés se sont plaints d’un manque de contacts avec leurs collègues. Et même 27 % du même manque vis-à-vis de leur hiérarchie. En même temps, pas facile de manager ses équipes en télétravail…

Près de 40 % des encadrants répondants ont noté une hausse de leur charge de travail et autant une hausse de leur temps de travail. 33 % se sont plaints d’un surplus d’informations à traiter (les mises en copie de mails notamment), 26 % d’un manque d’échange avec la hiérarchie et 18 % de dilemmes éthiques.

Le signe d’un malaise que les directions ont tout intérêt à ne pas ignorer.

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