Ils sont confinés depuis le 16 mars. Joachim, 30 ans, est expert-comptable dans une société au Luxembourg composée de 800 collaborateurs. Son épouse est, elle aussi, experte-comptable dans le même groupe. Ils habitent en France à proximité de la frontière luxembourgeoise. Ils n’ont pas encore d’enfant et ont la chance de vivre dans une grande maison « avec piscine ». Tous les deux sont en télétravail et continuent d’effectuer 40 heures par semaine « voire plus ».

Joachim est responsable d’une équipe de 15 personnes avec lesquelles il entretient des liens quotidiens « mais à distance ». Il a souhaité partager son expérience avec les frontaliers qui vivent la même situation que lui.

Le télétravail peut être source de déstabilisation

La rédaction : comment gère-t-on sa vie privée et professionnelle ?
Joachim : être en télétravail demande un temps de préparation. Au début, il y a une certaine forme d’euphorie à travailler chez soi. Mais au fil du temps, on se rend vite compte que ce n’est pas si simple et qu’il vaut mieux bien s’organiser.

Pour ma part, je commence vers 8h, je m’oblige à prendre un temps de pause entre 12h et 13h. Je finis généralement vers 18h. Ensuite, je m’accorde du temps libre. La journée est finie et les dossiers attendront le lendemain. Je pense qu’une mauvaise gestion du télétravail peut être néfaste pour le moral mais aussi la qualité du travail.

Par exemple, je manage de nombreux salariés appelés « juniors » qui ne connaissent pas le travail à distance parce qu’ils ont tous moins de 25 ans. Il faut reconnaître qu’ils se lèvent plus tard. Du coup, ils travaillent plus tard voire le week-end pour être à jour. Par conséquent, ils se fatiguent rapidement et parfois perdent en motivation. C’est un cercle vicieux auquel il faut être particulièrement vigilant. En tant que manager, je suis là pour leur rappeler les règles d’hygiène du télétravail afin qu’ils vivent au mieux cette situation compliquée.

Problèmes de réseaux et de connexion, galère !

La rédaction : comment se passe la collaboration avec vos 15 collaborateurs ?
Joachim : entre les problèmes de réseaux saturés ou inaccessibles à la campagne, le manque d’équipements liés au fait que le confinement s’est fait très rapidement, il faut une bonne dose de patience. Mais la situation a été réglée rapidement puisque les salariés ont reçu, directement chez eux, de la part de l’entreprise le matériel dont ils avaient besoin. Notre société a aussi digitalisé toute la paperasserie afin que chacun des collaborateurs accèdent à tous les éléments pour leurs études.

Pour faire le point sur les dossiers, je communique via les réseaux sociaux, j’organise des visio-conférences, je téléphone… En comptabilité, cette période correspond à une forte activité fiscale pour nous. Nos efforts sont soutenus, même en période de confinement, on ne doit pas relâcher les efforts.

Le Luxembourg va mettre du temps pour se relever

La rédaction : en tant qu’expert-comptable, que pensez-vous de cette situation sur le plan économique ?
Joachim : c’est une récession économique sans précédent pour le Grand-Duché comme pour l’ensemble des autres pays d’ailleurs. Je n’engage que mon opinion mais je trouve que le montant des aides accordées aux entreprises en difficulté est faible au vu de la situation désastreuse qu’elles vivent. Je pense que Luxembourg va mettre du temps à se relever.

Retrouver rapidement les gens que nous aimons

La rédaction : comment occupez-vous votre temps libre ?
Joachim : j’ai une grande maison de 150 m2 avec un espace de jardin 15 ares et une piscine. Je ne me plains pas. Le confinement me permet de m’occuper de tous ces espaces intérieurs et extérieurs. J’ai redécouvert ma maison et comme tout bricoleur non expérimenté, je fais de mon mieux (il rit).

Nous avons organisé avec les habitants de mon quartier des courses collectives afin que tout le monde ne sorte pas en même temps. Une solidarité que j’apprécie en temps de crise et perdura au delà de cette pandémie. Mon voisin s’improvise DJ tous les soirs. Je lui propose une play liste de chansons que j’aime et j’ai le droit à un petit concert, assis sur mon banc, devant la porte de mon habitation.

La rédaction : que vous manque-t-il le plus ?
Joachim :  ma famille et mes amis. Nous avions l’habitude de nous retrouver régulièrement. Bien que Facetime nous permet d’échanger, il faut reconnaître que ce n’est pas pareil.

La rédaction : quel serait le meilleur conseil que vous pourriez donner ?
Joachim : je demanderais aux personnes de rester chez eux afin que nous puissions tous retrouver rapidement les gens que nous aimons.

N.B. Si vous souhaitez partager votre expérience, contactez nous par mail [email protected] ou remplissez ce formulaire.

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