La situation pourrait sembler paradoxale pour qui méconnaitrait les spécificités inhérentes au télétravail au Luxembourg. Car si les frontaliers sont tenus de ne pas dépasser 19 jours annuels (en Allemagne) ou 34 jours (en France et en Belgique) sous peine de se voir devenir fiscalement redevables dans leur pays d’origine, les résidents, eux, ont la possibilité de travailler de chez eux autant de jours que leur employeur leur permet.

Quoiqu’il en soit, pour les résidents comme pour les frontaliers, qu’il soit limité ou plus libre, le télétravail est déjà largement développé au Grand-Duché ; le Covid-19 n’ayant qu’accélérer le mouvement.

Le Luxembourg dans le trio de tête

Compilées et analysées par Eurofound, la Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail, les données ont permis d’obtenir une estimation du nombre de « télétravailleurs » dans l’Union européenne en 2021 : 41,7 millions, soit environ deux salariés sur dix (soit le double par rapport à 2019 et l’avant Covid-19).

Une estimation à prendre avec prudence, tant les disparités sont importantes en fonction des pays. Le fossé est ainsi quasi abyssal entre le taux de télétravailleurs en Bulgarie (autour de 5 %) et les Pays-Bas, champions européens de la discipline avec 50 %, soit un salarié sur deux qui a la possibilité de travailler de chez soi !

La seconde place est occupée par la Suède, avec un taux frôlant les 45 % (près de 42 % chez les hommes et 46 % chez les Hollandaises). Enfin, c’est le Luxembourg qui complète le podium avec 45 % de salariés ayant télétravaillé en 2021, une statistique quasi identique chez les hommes comme chez les femmes. À titre indicatif, la moyenne dans l’Europe des 27 se situe un peu au-dessus des 20 %.

Qu’il soit largement ou au contraire peu répandu, le télétravail a progressé dans la totalité des pays de l’U.E, la plupart du temps bien « aidé » par les mesures de prévention sanitaire mises en place pour lutter contre la pandémie.

Travaille-t-on vraiment plus à la maison ?

Parmi les autres enseignements tirés du rapport d’Eurofound, on apprend que le profil type du télétravailleur européen est un salarié souvent diplômé (de l’enseignement supérieur), plutôt urbain, bien rémunéré et occupant un poste dans la banque, les assurances, les médias, la haute technologie ou l’éducation.

Un télétravailleur qui, toujours d’après le rapport, consacrerait plus de temps à son job les jours où il ne serait pas en présentiel : « Au Luxembourg, une enquête de Schütz et Thiele de 2020 a révélé que les télétravailleurs travaillaient en moyenne six à dix heures de plus par semaine que les travailleurs sur site. »

Et les résidents Luxembourgeois ne seraient pas isolés en Europe, Eurofound indiquant en ce sens que « des études menées en Belgique (…) et en Allemagne suggèrent qu’environ la moitié des télétravailleurs interrogés ont déclaré travailler plus d’heures qu’avant la pandémie ». Constat similaire en France où une étude menée en 2021 assurait que 63 % des Français partageaient ce sentiment.

Si l’étude d’Eurofound confirme une tendance déjà bien amorcée au Luxembourg et sur le Vieux Continent, elle s’inscrit tout de même en opposition à une autre étude, menée cette fois par l’American Time Use Survey du Bureau des Statistiques du travail aux États-Unis.

Dans ce dernier rapport, les salariés en télétravail travailleraient au contraire moins que s’ils étaient en présentiel : 5,6 heures par jour contre 7,8 heures et ce, bien qu’ayant précisé (à hauteur de 35 %) qu’ils se mettaient au labeur plus tôt, à l’heure où d’ordinaire ils sont encore dans les transports les amenant au bureau. Alors d’où vient l’écart ? En réalité, s’ils commencent bien plus tôt le matin, les télétravailleurs finiraient en revanche plus tôt le soir, s’épargnant en plus le temps de trajet retour du bureau.

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