Depuis 2016, Maître Pascal Peuvrel, l’avocat de la première affaire concernant la discrimination que subissent les enfants non-biologiques des travailleurs frontaliers se bat avec ses collaborateurs Me Fabrice BRENNEIS et Me Quentin GAVILLET pour que cesse cette injustice.

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Les frontaliers n’ont pas les mêmes droits que les résidents

Ce matin, Me Peuvrel s’insurge : “Pourquoi les enfants des familles recomposées des résidents ont droit aux allocations familiales et pas les enfants des travailleurs frontaliers ?“. Cette question, beaucoup se la posent. Les travailleurs frontaliers paient les mêmes cotisations, les mêmes impôts, mais ne sont pas traités de la même façon. “C’est un mépris pour les travailleurs frontaliers. D’un côté, le Luxembourg réclame la main d’oeuvre des frontaliers parce qu’on en a besoin et d’un autre côté, on les discrimine. Ils représentent près de la moitié des travailleurs au Luxembourg“, nous dit-il.

La CAE et le Conseil Supérieur de la sécurité sociale n’interprètent pas correctement la décision de la CJUE (Cour de justice de l’union européenne)

La loi a changé et le législateur a suivi ce qui se dégageait de l’arrêt de la cour de justice européenne. Les enfants non biologiques ont le droit de bénéficier des allocations familiales au Luxembourg, dès le moment où le travailleur pourvoit à leur entretien. Cette notion est donc reprise dans le texte de la nouvelle loi, mais le problème vient de l’interprétation qui en est faite par la CAE et la juridiction d’appel. Le texte dit “pourvoit aux besoins de l’enfant”, mais la caisse pour l’avenir des enfants demande que le travailleur frontalier prouve qu’il pourvoit à TOUS les besoins. Donc, dès le moment où il y a le versement d’une pension alimentaire, par exemple, quel qu’en soit le montant, l’enfant est exclu du système. ‘L’interprétation est trop restrictive.“, ajoute Pascal Peuvrel.

On gagne toutes les affaires en première instance et toutes ces décisions sont réformées en appel, malgré les pièces données. La seule solution c’est d’aller en cassation“. Le cabinet de Me Peuvrel est en train de les déposer.

Il faut que le parent soit en prison ou décédé pour obtenir les allocations familiales

Le cabinet d’avocats Jurislux, à l’origine de la première affaire, nous explique deux cas précis où les enfants non-biologiques du travailleur frontalier ont à nouveau droit aux allocations familiales du Luxembourg.

Dans le premier cas, le beau-père travaille au Luxembourg et s’est vu retirer les allocations familiales en 2016. Après un recours par le biais du cabinet d’avocats, le Conseil supérieur de la sécurité sociale a accepté de verser à nouveau les prestations sociales car le père biologique étant décédé, il ne pouvait de fait, pourvoir à l’entretien de ses enfants. La décision vient de tomber, et nous sommes en 2023.

Dans le second dossier, le scénario est identique, mais dans ce dernier cas, le père est en prison et donc ne verse rien pour ses enfants.

Déjà les frontaliers avaient été discriminés avec les bourses d’études

Souvenez-vous, en 2010,  les enfants  des frontaliers avaient aussi été exclus du système de l’octroi des bourses. En 2013, la cour de justice de l’union européenne (CJUE) a jugé que c’était aussi discriminatoire. En 2014, la nouvelle loi excluait les enfants des frontaliers non-biologiques. Enfin en décembre 2016, les frontaliers ont eu gain de cause avec des conditions d’octroi identiques à celles des allocations familiales. Ainsi, les parents non-biologiques doivent justifier qu’ils pourvoient à l’entretien des enfants. La grande différence, est que le Cedies qui octroie les bourses fait une interprétation large de la notion de pourvoit à l’entretien, en ce sens où il n’est pas obligatoire de pourvoir à l’entièreté des besoins. Ce qui semble logique et juste. La CAE quant à elle, fait une interprétation bien trop restrictive de cette notion de pourvoi concernant les allocations familiales.

Où en sommes-nous ?

Les trois avocats du cabinet Jurislux restent confiants car c’est une injustice et l’issue est déjà favorable pour certains. Mais il faut en passer par des recours et le cabinet continue de recevoir régulièrement des demandes. Comme pour les bourses d’études, où déjà les mêmes avocats s’étaient battu et n’avaient rien lâché, les travailleurs frontaliers espèrent une issue favorable. Pour cela, il suffirait que la CAE (Caisse pour l’avenir des enfants) interprète la notion de pourvoi à l’entretien de  façon  large telle que préconisé par la CJUE et donc moins restrictive en n’exigeant plus que l’entièreté des besoins de l’enfant soit pourvue par le travailleur frontalier.

Les frontaliers ne doivent pas baisser les bras et doivent continuer le combat !“, ajoute Pascal Peuvrel.

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